Perdue dans le grand hall bondé, elle observait cette horloge imposante qui semblait la narguer de son aiguille tournoyante, fuyant les secondes aussi rapidement que les voyageurs se hâtaient de rejoindre les quais. Elle inspira profondément en s'éloignant de tous ces gens qui s'agglutinaient aux pieds des écrans d'informations et de cette voix, synthétique et monocorde, qui répétait inlassablement les mêmes consignes de sécurité sans que personne n'y prête vraiment attention.
La jeune femme n'eut besoin que de quelques minutes pour regagner la sortie, bien loin de toute cette folie urbaine, où son regard pouvait aisément balayer les alentours à la recherche de l'homme pour lequel elle était là, aujourd’hui.
Il portait en lui une force tranquille qu'elle arrivait à percevoir, par-delà les grondements sourds des trains qui transportaient ses inconnus vers leur destinée. Elle ressentait, plus fort encore, ce lien indéfinissable qui les unissait depuis le premier jour, alors que leurs échanges venaient à peine de commencer, par le biais d'un écran d'ordinateur. L'évidence était telle qu'elle leur sauta littéralement aux yeux : leurs âmes se connaissaient depuis toujours et elles se retrouvaient, enfin.
Ce fut alors qu'elle sentit sa présence, juste dans son dos ; elle se retourna et croisa son regard, pour la première fois sans écran interposé. Elle pouvait lire dans ses yeux la même adoration et l'admiration sincère qu'il lui inspirait. Deux personnes bien différentes, mais si semblables ; deux êtres que l'univers avait rassemblés mais que, pourtant, tout séparait. Il était la lumière et elle, l'ombre ; c'était ainsi depuis le début de leur histoire. Il était son remède, le seul à la connaître aussi intimement. Avec lui, elle n’avait plus peur d’être elle-même.
Ils restèrent plusieurs secondes à s’observer, comme s’ils ne s’étaient jamais vus. C’était un peu ça, l’étrangeté de cette situation : ils avaient vécu ces derniers mois si intensément qu’ils semblaient marcher sur un fil, en équilibre entre le rêve et la réalité, pas tout à fait certains de ne pas s’égarer, une nouvelle fois, dans leurs songes romantiques. Lorsque le regard clair de cet homme glissa sur son corps, elle sentit des milliers de frissons recouvrir son épiderme et enflammer sa chair. Elle était si curieuse, désireuse, assoiffée de connaître le goût de ses lèvres, de sa langue, et celui de sa peau... S'ils leur avaient été confié, quelques mois plus tôt, qu'une attirance aussi forte puisse exister entre deux personnes qui ne s'étaient encore jamais touchées, ils ne l'auraient pas cru. C'était néanmoins l'incroyable vérité : une intense passion était née entre eux, un besoin viscéral de sceller l'union de leurs deux corps, de s'offrir l'un à l'autre, de s'abandonner à cet amour qui les consumait.
Il effleura délicatement son poignet ; sa respiration se creusa, instantanément. Son cœur palpitant semblait vouloir sortir de sa poitrine et résonnait violemment dans ses oreilles. D'un geste tendre, elle posa sa paume sur sa joue, dessinant le contour de sa mâchoire du bout des doigts. Elle tremblait, sans doute l'émotion était-elle trop forte, difficile à contenir. La jeune femme lorgnait sa bouche avec insistance en mordillant inconsciemment ses lèvres. Happé par cette invitation silencieuse, il l'attira plus près de lui tandis qu’elle approchait lentement son visage du sien. Plus rien n’avait d’importance que cette bulle qui s’était formée autour d’eux.
Un bruit sourd, puissant, vint alors déchirer le silence ; le ciel s’assombrit et les immeubles s’écroulèrent les uns après les autres. Elle paniquait, en prise à une douloureuse impression de déjà-vu. Une lumière aveuglante jaillit du corps de celui qu’elle aimait, l’obligeant à reculer de plusieurs pas et, impuissante, elle le regarda disparaître sous ses yeux.
Puis, une voix. Celle d’une enfant qui attendait impatiemment le réveil de sa maman. Un retour brutal à la réalité... Toujours ce même rêve inachevé !
Il est des rencontres qui demeurent mystérieuses, indescriptibles. Des rencontres qui ne s'invente pas, ne s'imaginent pas… mais qui se vivent, tout simplement.
Vous avez écrit un livre : un roman, un essai, des poèmes… Il traine dans un tiroir.
Publiez-le sans frais, partagez-le, faites le lire et profitez des avis et des commentaires de lecteurs objectifs…
Merci @Russo de vous être laissé transporter quelques instants par mes écrits.
Les rêves ne sont jamais très loin des cauchemars, tout comme les espoirs s'agglutinent souvent aux portes de la désillusion. Il y a des choses qui ne s'expliquent pas, des sentiments qui naissent envers et contre tout, qui se gardent au chaud, qui nous apprennent à grandir, qui nous soulèvent et nous font sombrer, parfois... C'est ça, l'amour, je cois : savoir qu'on ne sait rien, et espérer toujours.
@Jean-Louis Ermine
Ce petit bout d'histoire était en réponse à l'appel à texte sous le signe de "la rencontre".
Parfois, grâce à l'écriture par exemple, il nous est offert de rencontrer des gens, certains de passage, d'autres qui sauront vous toucher avant même d'avoir croiser leur regard.
J'ai appris, depuis quelque temps, que les rencontres les plus folles n'étaient pas les virtuelles, les imaginaires, ni celle faites de chair et d'os... Mais pour moi, et plus que tout, les plus belles sont les rencontres des âmes. Ce sont celles-ci qui sont les plus merveilleuses, que j'ai voulu mettre en lumière et que je tenais à partager aujourd'hui.
Merci de votre passage sur mon texte et de votre retour !
@madline
Ce "truc", comme vous aimez à l'appeler, n'était rien d'autre qu'une réponse à un appel à texte avec pour thème "la rencontre". 4000 mots maximum, et tellement de choses à raconter ! Une simple histoire, un sentiment, un espoir. Serait-ce votre mère qui vous disait de chercher impérativement une morale à chaque histoire ? Excusez si mon "truc" ne répondait à vos attentes, mais en lisant vos nombreux commentaires sur d'autres textes, je crois simplement que vos exigences ne sauraient trouver grande satisfaction en lisant mes "trucs" sans intérêt ni morale. Mais merci d'y avoir porter intérêt, malgré tout !
Merci @Jenie pour votre retour.
C'est tout à fait le sentiment que j'ai voulu transmettre, une douce désillusion... Je suis ravie que vous l'ayez compris et apprécié !
@Elena Spark,
Bonjour, j'ai assez apprécié votre texte, plus particulièrement le twist final, assez inattendu !
Quand le rêve confine au cauchemar, celui qui nous renvoie à notre solitude ... Certainement !
Rencontres virtuelles, rencontres rêvées, rencontres factices, rencontres décevantes ! On n'a pas fini de chercher des substituts aux véritables rencontres !
@Elena Sparke,
Bonjour,
J'ai bien aimé votre texte.
Je ne m'attendais pas à cette fin "brutale" qui contraste avec la douce histoire d'amour vécue par la jeune femme au début. Comme dans un merveilleux rêve avec un retour brutal à la réalité.