Interview
Le 21 juin 2023

Regard sur un livre : Métis de Stog

Jacques Cartier débarque à Gaspé en 1534. Pour ces "terres indiennes", c’est le début d’une colonisation, qui ira jusqu’au "génocide culturel". Cinq cents ans d’histoire mouvementée et souvent tenue cachée, aboutiront en 2019 à la loi sur la reconnaissance et la mise en œuvre des droits des peuples autochtones. Stog s’attaque à la question à sa façon, avec son cœur.
Métis de Stog

Qui sont les Métis ?

Un des trois peuples autochtones du Canada avec les Premières Nations et les Inuits.

C’est au sein de ce peuple que Stog plante son histoire, au moment où commence "le début de la dépossession territoriale, de la dépossession culturelle, de l’ethnocide, du génocide", à la fin du 19e siècle, alors que sont orchestrées famines et "guerres" bactériologiques à l’encontre des Natifs.

Les Métis naissent des unions entre les femmes Nez Percés, Assiniboine, Cri, et les "coureurs des bois" qui arpentent le Canada depuis le milieu du 17e siècle. Des milliers d’hommes qui s’enfoncèrent dans les bois de l’Amérique terra incognita, avec pour seul viatique : fusils, canots et courage, à la recherche du profit du commerce des fourrures.

En 1883, pour parachever l’anéantissement des nations indiennes, le gouvernement de Sir John A. Macdonald institue le système des pensionnats (le premier ayant été ouvert en Ontario en 1831, et le dernier fermera ses portes en 1996). Comme ailleurs, en Australie, par exemple, l’Anglais sépare l’enfant de sa famille afin de mieux détruire son identité et sa langue.

Pendant ce temps, les Blancs prospèrent.

Certains d’entre eux plus que d’autres, comme c’est le cas des Warmfield, industriels de l’habillement, plus exactement du sous-vêtement masculin.

Une famille, en descendance directe par la mère, du premier des Premiers ministres canadiens de la jeune histoire du pays. Forte d’une supériorité morale à l’épreuve de tous doutes, elle n’en demeure pas moins progressiste, en ce sens, qu’elle concède volontiers aux peuplades multiethniques, quelques assurances et droits. Magnanimement, elle considère que c’est un devoir du Commonwealth que de partager les bienfaits de la civilisation en général et du caleçon long en particulier.

Voici donc les protagonistes dont Stog va nous décrire le destin en une série de chapitres filmés en champs et contrechamps.

D’un côté une lutte pour survivre, de l’autre une lutte pour se maintenir au sommet de la chaîne alimentaire.

D’un côté, le lien à la Nature, et, plus encore : aux Esprits de la Nature. Stog nous régale de scènes prises sur le vif et puisées dans son imaginaire.

Il nous fait voir les couleurs du ciel et de la nuit, nous fait sentir l’épuisement des forces, la morsure de la faim, mais aussi la neige, l’herbe, la puissance des arbres, la sauvage douceur des chevaux.

De l’autre côté, il dépeint avec ce qu’il faut de dérision une société sans queue ni tête ; l’obstination à avoir, avoir plus, accumuler et paraître.

J’aime bien sonder un texte pour découvrir les mots que l’auteur porte inconsciemment.

Dans ce texte, j’ai trouvé d’un côté : chevaux, neige, esprit, enfants. De l’autre : pouvoir, conservatisme, mère, famille.

Deux mondes parallèles, l’un essayant à tout prix d’effacer l’autre, et ce dernier recourant aux forces de la Nature et de l’Esprit pour continuer à couler, comme la rivière, malgré le gel, la sécheresse et les folies humaines.

Entre ces deux mondes, un personnage contemporain, apparemment sans passé et probablement sans futur. Une charnière ou peut-être mieux : un isthme. Son nom n’est peut-être pas un hasard : René. René Descartons. Un mendigot, un laissé-pour-compte, un invisible, voire intouchable. Un innocent, c’est certain, et bien entendu, la clé de l’unique porte contenue dans cette histoire.

Car, et maintenant nous le savons, c’est une signature de Stog : la rédemption guette l’homme. Et d’ailleurs est-ce étonnant que rédemption soit donnée comme synonyme de libération / affranchissement / décolonisation ? Non, certainement pas, et c’est quand les coïncidences s’amoncellent à ce point que l’on peut sonder la sincérité de celui ou celle qui écrit. Et sa générosité aussi, car même dans le camp « sans cœur », l’auteur réussit à semer ce qu’il faut de clémence pour que le monde ne soit pas tout blanc ou tout noir.

Si la rédemption est la signature de Stog, la fraternité est son sceau. 

Post-Scriptum :

La Loi constitutionnelle de 1982 reconnaît les Métis comme l'un des trois peuples autochtones du Canada avec les Premières Nations et les Inuits. Ce qui leur a permis d'obtenir gain de cause devant la cour pour la reconnaissance des droits ancestraux, comme le droit à la chasse. En 2003, une ordonnance de l'Ontario a statué qu'une communauté métisse de l'Ontario avait le droit ancestral de chasser pour ses besoins alimentaires, une décision perçue comme un premier pas vers des droits de chasse complets pour toute la communauté.

 

Pamela A

 

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Publié le 30 Juin 2023