Quel a été le point de départ pour écrire "Tribulations" ? Est-ce un personnage que vous avez rencontré, ou un questionnement personnel ?
Le point de départ : un fameux 5 octobre 1985 quand mon corps de jeune enfant de 9 ans a été percuté par une voiture
J'ai vécu alors une expérience qui a bouleversé ma vie. Il m'a fallu plus de 35 ans avant d'y poser des mots. j'ai ressenti avec une grande force des images puissantes.
Par exemple je me suis vu au-dessus du SAMU qui transportait mon corps, une vision à 360°. J'entendais calmement et paisiblement toutes les conversations des pompiers entre mon frère et mes copains présents ce jour-là pour un anniversaire.
Subtile ironie de l'histoire, ma mère m'a offert pour ma fête, le lendemain à la clinique des plaques d'immatriculation de voitures américaines qu'on pouvait accrocher aux murs de nos chambres, c'était la mode...Ils ont de l'humour là-haut !
Un premier roman part toujours de soi avant d'aller vers les autres. Écrire selon moi c'est mettre de l'ordre dans un chaos avec un Big bang qui va créer ex nihilo un univers.
Un livre, c’est une invitation. Les gens accepteront ou non de le visiter. Et pour finir, il y a bien sûr un questionnement personnel derrière tout ça. La mort, la rédemption, le péché, Dieu, toutes ces cartes postales que j'ai ramenées de mon accident du 5 octobre 1985 et qui me suivent quotidiennement à chaque pas. De quoi écrire mes prochains livres...
Entre cynisme, humour et gravité, le livre change de registre. Est ce une volonté ou quelque chose qui s’est imposé ?
Comment l’organisez-vous dans votre écriture ?
Vade rétro Cortex ! Je laisse mon imagination prendre les commandes et le contrôle de Word. Après je peaufine. C'est ce que j'ai toujours fait dans mon travail d'auteur pour la télé pendant plus de 26 ans. J'écris des lignes et puis après je taille, je taille...
J'ai fait du sketch pour des gens comme Jérôme Commandeur très hard core, ou des Sketchs pour Nos chers voisins que j'ai co-crée sur TF1 beaucoup plus conventionnel ;). La vérité est partout et nulle part. J'aime aussi des gens comme Pierre Desproges que mon père écoutait dans la voiture quand j'étais petit.
Un truc qui m'a beaucoup amusé sur le site MBS quand j'ai déposé Tribulations c'est de lire les commentaires des uns et des autres. Certains déploraient mon cynisme, mon humour et ne décelaient pas la profondeur de Gabriel, ni dans sa quête de rédemption ni dans sa personnalité alors que pour d'autres c'était l'inverse, on appréciait mon style uppercut, droit tandis que d'autres trouvaient mon style (très) trop masculin (véridique et ce compliment vient d'une éditrice de Paris). Cynisme et humour noir, oui mais pas exclusivement.
Ce n'est que mon premier livre. Il a les défauts et les qualités de sa fougue primaire !
Gabriel semble être un anti-héros typique. Fallait-il qu’il ne soit pas exemplaire pour être vrai ?
"Dieu préfère un repenti à 1000 justes !". Quel est l'intérêt de vivre ou de faire vivre un héros sur qui tout glisse.
Notre mouton noir Gabriel, doit être rugueux, excessif, traversé par des mouvements tectoniques karmiques et psychologiques violents.
Sinon à quoi bon ?
Comment distinguer le blanc pur si ce n'est dans le noir le plus absolu ?
Le livre traite de la valeur de la mémoire et du récit.
Oui ! Il devait s'appeler initialement Transmissions, c'est pour dire ! Je suis un fan absolu des biographies. Je suis fasciné par la vie des petites gens et des grandes personnalités.
Ce que veux dire c'est que par les temps qui courent, l'homme ne peut plus se passer le témoin qui allait avant de mains en mains, comme dans une course. Il est tombé en chemin. Plus personne ne donne de son temps, ni écoute la personne âgée, le vieux la vieille.
Avant on naissait dans un lit, on vivait sa vie, et puis on y mourrait. On côtoyait la vie et la mort.
L'expérience se transmettait de corps de métier en corps de métier, de vies en vies. L'expérience vécue était holistique.
Maintenant tout est neutre, cela finit dans un EHPAD. Circulez il n'y a plus rien à voir.
Si nous nous sommes incarnés c'est bien pour une raison.
La relation entre Gabriel et M. Barsékian est inattendue. Quelle est l’intention ?
Surprendre mon lecteur ! mon intention première quand j'écris, dés le premier mot, la première page est de captiver mon auditoire, de le brusquer ou de le caresser mais en tout cas de le divertir.
Il faut, c'est un impératif, faire voyager. Les lecteurs d’aujourd’hui lisent entre 2 stations de bus, métros etc..., ils n'ont pas le temps, ni la disponibilité, c'est mon avis, de se coltiner les pages d'un auteur qui s'est regardé le nombril, qui cabotine. Sinon ils vont louper l'arrêt.
Les auteurs qui s'aiment trop c'est horrible. On écrit pour les autres. Toujours.
La fin semble ouverte et symbolique. Une volonté ou une incapacité de l’auteur à la clore ?
Dites donc vous seriez pas un peu mon ange gardien vous ? Comment çà une incapacité à la clore ? Non mais enfin ?!
Trêve de plaisanteries, mes histoires commenceront toujours dramatiquement et se termineront toujours bien. Le monde meurt d'histoires violentes et torturées, même quand elles sont bien écrites. Je veux montrer comme dans la chanson de Polnareff, qu'on ira tous au Paradis.
Certains dans un train d'enfer...
Je veux écrire des histoires qui donnent de l'espoir. Je veux toucher les gens, les émouvoir mais sans excès de pathos, en touchant une de leurs cordes sensibles et que leurs yeux deviennent brillants. Je veux faire bouger les montagnes ou simplement faire mon job d'artiste : distraire en amusant ! Je veux les faire vibrer !
Le merveilleux est dans la vie de Mr et Mme Tout le Monde, c'est à moi de le réveiller.
Vous avez écrit un livre : un roman, un essai, des poèmes… Il traine dans un tiroir.
Publiez-le sans frais, partagez-le, faites le lire et profitez des avis et des commentaires de lecteurs objectifs…