Qu’a-t-il fait de son putain de stylo ? Une nuit à moisir ici ! Ils m’ont brutalement attrapé, arraché à ma famille pour m’enfermer derrière ces barreaux gelés. Aucune explication, rien qui ne puisse éclairer leurs comportements. Je déjeunai, en lézardant sur la terrasse de ma maison, lorsqu’ils sont arrivés. En quelques secondes, je fus attaché, prisonnier, jeté dans une froide cellule odorante. Depuis j’attends, sans comprendre. Sonné par les évènements, épuisé, je m’assoupis.
Soudain, je sens une présence. J’entrouvre doucement un œil et observe mon environnement. Un petit homme m’étudie. Quelque chose en lui éveille ma vigilance : peut-être sa blouse blanche, à moins que ce ne soit son sourire carnassier. Il s’accroupit, m’examine de la tête aux pieds, sans complaisance et se relève. Cet éloignement furtif me rassure un peu. Je ne sens plus son haleine fétide. Il recule de deux pas pour mieux m’observer. Son regard se trouble. Son corps bascule d’une jambe sur l’autre. Son ventre légèrement proéminent aimante ma curiosité. Cette pantomime insolite m’inciterait à rire dans un environnement plus serein. Là, elle me glace le sang.
L’homme me tourne alors le dos et s’éloigne rapidement en oscillant de gauche à droite. « Clac, clac » le bruit menaçant se dissout. Cet individu, ailleurs, n’aurait même pas éveillé mon attention. Petit, en surpoids, avec aussi peu de cheveux que de charisme. Sa démarche incertaine dénote un manque d’assurance. Ses vêtements sont fades, sans fantaisie. Ce type transpire l’ennui.
Et pourtant…
Il porte une blouse d’un blanc immaculé avec comme seul signe distinctif un stylo accroché à sa poche, une pièce rutilante d’une grande marque… Et un regard froid, perçant, capable de vous juger, de vous écorcher l’âme sans le moindre clignotement de paupière. Une intelligence sous-jacente au bord de l’explosion. Un prédateur prêt à bondir ? Suis-je aux mains d’un savant fou ?
Les heures s’écoulent, entraînant dans leurs flots de multiples visions néfastes. Entre léthargie et éveil, mon esprit s’engourdit paresseusement. Des images inquiétantes de chercheurs nazis inondent mes pensées. Je finis par plonger dans les méandres du sommeil.
« Clac, clac… »
Mon cœur bondit à la résonnance de ce pas bien connu
« Clac, clac »
Je me lève brusquement, prêt à affronter l’inconnu. Il se rapproche dangereusement et s’accroupit en s’accrochant aux barreaux de ma cellule. Son regard bleuté n’a plus la froideur de mon souvenir. Il est empreint de douceur, de délicatesse. Il ne porte plus sa blouse blanche. Vêtu d’un survêtement bon marché, il devient moins menaçant. Mais qu’a-t ’il fait de son stylo ? Je scrute ses habits, espérant trouver réponse à mes interrogations. Cette question m’obsède. Qu’a-t-il fait de son putain de stylo ? Comme si toute ma vie dépendait de cet objet, je bloque sur cette énigme. Ce crayon, c’était le dernier élément incongru du personnage. Sans lui, je ne sais plus orienter mes pensées, mon jugement.
Il se relève et ouvre la porte. Étonné, je m’approche de lui. Il me caresse doucement le museau en prononçant ces mots :
— Viens Simba, tu verras on sera bien ensemble.
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Par goût personnel, je n'aime pas les personnifications, encore moins lorsqu'elles prêtent des pensées aussi improbables, mais cette nouvelle est rythmée. Elle possède son agréable petite musique... Quelques fautes aussi, mais fermons les yeux et soyons indulgents ;-).
Bravo et bonne soirée. Amicalement,
Michèle