Auteur
Le 12 avr 2022

La servitude volontaire

C'est une réflexion plus qu'une nouvelle que Krydece nous fait parvenir sur un thème référent : la servitude volontaire. A la fois philosophique, politique, mais aussi applicable dans de nombreuses sphères, notamment celle de l'entreprise, la servitude volontaire entre dans le champ du double jeu car elle n’est pas qu’une soumission du simple je, elle est mâtinée de convoitises, de combinaisons et de concessions.
Les buts du peuple sont plus honnêtes que ceux des grands, les uns voulant opprimer, l’autre ne pas être opprimé. Nicolas MACHIAVEL.Les buts du peuple sont plus honnêtes que ceux des grands, les uns voulant opprimer, l’autre ne pas être opprimé. Nicolas MACHIAVEL.

 Celui qui lutte contre les monstres doit veiller à ne pas le devenir lui-même. Friedrich NIETZSCHE.

 

Un journal littéraire ne se prête pas à une voie rapide par thème mais il emprunte un sentier escarpé selon l’inspiration et les circonstances. Pour répondre à cette vacance que certains ont justement évoquée, il a semblé intéressant d’extraire de mon modeste journal des sentences ayant trait à ce vaste sujet, hélas éternel.

 

Il s’avère que trois pulsions animent l’être humain : la copulation, la création-destruction et la compétition. De cette dernière sourdent trois attitudes possibles consécutives aux rapports de force, la fuite, la guerre et la servitude.

 

La servitude volontaire va au-delà de ce que la prudence impose puisqu’une sorte de fascination envieuse, une servilité furieuse et une docilité impérieuse nous conduisent à un abaissement de chaque instant, d’autant plus inintelligible qu’il n’est pas toujours requis ou exigé.

 

Il peut se révéler intéressant de démarrer l’étude des points de vue et du mécanisme par deux citations, successivement de constat et d’espoir ce qui permet à l’esprit de passer alternativement du noir corbeau au gris passereau. Elles seront complétées par des sentences issues également de « Et si de probité tout était revêtu ».

 

L’asservi

La dictature parfaite serait une dictature qui aurait les apparences de la démocratie, une prison sans murs dont les prisonniers ne songeraient pas à s’évader, un système d’esclavage où, grâce à la consommation et au divertissement, les esclaves auraient l’amour de leur servitude. ALDOUS HUXLEY.

L’homme est docile pour la servitude et égotiste pour le privilège.
La propagande nous asservit, la publicité nous infantilise et la convoitise nous avilit.
Il se trouve toujours des laudateurs dévoués

Pour adopter les schémas, les modes et pensées

Du dominant ; ils vont copier avec zèle

Les folies, l’ignorance, enfin tout pêle-mêle.

Si l’obéissance est le résultat de l’instinct des masses, la révolte est celui de leur réflexion. NAPOLÉON BONAPARTE.

 

Le maître

En un mot, le moi a deux propriétés : il est injuste en soi, en ce qu'il se fait centre de tout ; il est incommode aux autres, en ce qu'il veut les asservir, car chaque moi est l'ennemi et se voudrait être le tyran de tous les autres. Blaise PASCAL.

La volonté de domination des egos est plus puissante que le besoin d’harmonie des esprits.
Par la suffisance qu’il s’inculque, l’ivresse du pouvoir qu’il subit, la soumission qu’il exige, la flatterie qu’il recherche, le dirigeant tend à l’incompétence dans sa fonction et au vide dans sa personne.
Les dirigeants agrippent les pots-de-vin, il ne subsiste que les pourboires.

Il serait juste que le peuple régnât à son tour sur ses oppresseurs et que la sueur baignât l’orgueil de leur front.LOUIS ANTOINE DE SAINT-JUST.

 

La sujétion

Les forts font comme ils l'entendent et les faibles souffrent comme il se doit. THUCYDIDE.

Toute société humaine tend à l’établissement de dirigeants parasites entretenus par des sujets producteurs.
La barbarie et le péculat des dirigeants s’abreuvent à la faiblesse et à l’envie des sujets.
Il semble fructueux aux dirigeants que quelque insécurité subsiste : ainsi, les sujets vivent dans la crainte, gardent matière à converser et maintiennent causes de querelle. L’essentiel est que les affaires ne subissent aucune entrave, que les nantis soient protégés, que le peuple soit docile.

Les buts du peuple sont plus honnêtes que ceux des grands, les uns voulant opprimer, l’autre ne pas être opprimé. Nicolas MACHIAVEL.

 

En résumé, il n’était pas envisageable que se terminassent ces propos (j’aurais dû employer le verbe finir !) sans invoquer l’initiateur de cette question lancinante.

Ce maître n’a pourtant que deux yeux, deux mains, un corps et rien de plus que n’a le dernier des habitants du nombre infini de nos villes. Ce qu’il a de plus que vous, ce sont les moyens que vous lui fournissez pour vous détruire. D’où tire-t-il les innombrables argus qui vous épient, si ce n’est de vos rangs ? Etienne de LA BOÉTIE (1530-1563).

 

 

 

 

 

Mmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm

 

A          Il est dans la nature de la servilité de contrefaire le dominant.

A          Le citoyen est redevenu sujet : le lucre dispose de la vie, altère la nature, propage la misère. Le citoyen est redevenu sujet : non, il est devenu objet.

A          Il se trouvera toujours des individus zélés et sans conscience pour appliquer et même amplifier les consignes totalitaires et délétères de dirigeants qui sauront ensuite ordonner l’élimination de ces mêmes collaborateurs lorsqu’ils seront moins efficaces.

 

M         Le dirigeant veut inquiéter pour être toujours craint tout en se rassurant pour être toujours serein.

M         L’homme penche plus vers l’aliénation que vers la liberté, incline davantage à la préséance qu’à l’égalité, estime mieux la domination que la fraternité.

M         Les dirigeants sont toujours unanimes pour promettre des lendemains radieux.

M         Les dirigeants s’estiment pertinents et brillants, étant toujours flattés et rarement critiqués ; seule la réalité se permet cet outrage.

M         La guerre repose sur la domination de l’ennemi, la paix réside dans la possession de l’autre.

M         Toute la problématique des dominants est d’obliger la multitude à travailler pour eux, dussent-ils eux-mêmes feindre de s’activer.

M         Nos dirigeants n’ont d’admirable que les qualités qu’ils feignent d’avoir, qualités que nous avons la faiblesse de leur abandonner.

 

S          Les structures, comme les individus, expriment la fermeté arrogante vis-à-vis des dépendants, figurent la servilité obligeante à l’égard des puissants.

S          L’homme invoque la liberté aliénante pour lui-même et appelle la sujétion coercitive pour les autres.

S          Nous sommes souvent les complices des exactions des dirigeants, bien que nous en devenions toujours les victimes.

S          Le cynisme des dirigeants s’abreuve à l’idéalisme des sujets.

 

 

Vous avez un livre dans votre tiroir ?

Publier gratuitement votre livre

Vous avez écrit un livre : un roman, un essai, des poèmes… Il traine dans un tiroir.
Publiez-le sans frais, partagez-le, faites le lire et profitez des avis et des commentaires de lecteurs objectifs…

@Nicolas MACHIAVEL.
J'ai adoré votre texte, riche et grinçant. Réaliste, philosophique, pour ceux qui aiment faire fonctionner leurs neurones, c'est un régal.
J'aime votre approche typographique différente également.
Merci pour le partage.
amicalement,
Maureen

Publié le 23 Avril 2022