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Le 22 fév 2024

Littérature démodée et littérature à la mode

Littéralement, la "littérature démodée" se rapporterait à des œuvres littéraires qui sont considérées comme dépassées ou obsolètes. Ces œuvres peuvent avoir été populaires à une époque donnée, mais avec les goûts, les normes culturelles, elles ne tiennent plus. Ainsi, certaines œuvres, (considérées comme chef d'oeuvre un temps donné) peuvent perdre de leur pertinence ou de leur attrait pour les lecteurs modernes. Mais une littérature peut-elle naitre démodée ? c’est une autre question
La cohérence des thèmes, le vocabulaire, la langue et la syntaxe, la tonalité la critique littéraire font qu'un livre est dans l'air du temps ou pas..La cohérence des thèmes, le vocabulaire, la langue et la syntaxe, la tonalité la critique littéraire font qu'un livre est dans l'air du temps ou pas

Y a-t-il une Littérature démodée, et une littérature à la mode ?

>> Difficile quand un éditeur ou un critique averti dit de votre livre : "ce n’est pas dans l’air du temps" ;" votre livre dépeint une période qui n’est pas à la mode" ; "ce type de traitement est trop romantique"
Que faire ? Est-ce juste parce qu’on essaie de se débarrasser de vous, ou y a-t-il une vérité dans ces jugements ?

Dans la littérature passée, on trouve facilement des références d’auteurs et de romans démodés

>> Quand on cherche dans la littérature passée, on trouve facilement les références d’auteurs et de romans démodés (attention, cela ne leur retire pas leur valeur ni leur contribution à la littérature).
Ainsi, les romans de Dickens sont souvent associés à la période victorienne, et peuvent sembler surannés en raison de leur style, de la morale proposée et de leurs descriptions détaillées de la société de l'époque. Thomas Hardy, dont les œuvres sont souvent ancrées dans la vie rurale du XIXe siècle en Angleterre nous parle moins. Leur contexte historique spécifique les ancre dans des réflexions où l'on se projette difficilement aujourd’hui.

Dans les romans et les essais d'aujourd'hui, on ne parle plus de la même façon de la satire, de l’ironie, de la réflexion philosophique, de l’amour, de la passion...

>> En tout cas, ces ouvrages nous contraignent à comprendre les époques, les contextes et les mentalités. Ce qui, bien sûr, au-delà de la lecture, implique un effort, un travail de projection ou de documentation.
« Bonjour Tristesse », scandale à l’époque, et perché sur les rayons inaccessibles des bibliothèques familiales, paraît aujourd’hui bien sage, suranné pour certains, et si l’on s’y intéresse encore, c’est plus pour le défi d’une jeune fille libre des années 50 qui repousse les lois morales, que pour la sexualité interdite d’une mineure avec un homme mûr.
Gabriel Matzneff, écrivain vedette, soutenu par des politologues, des éditeurs et des journalistes, qui faisait s'esclaffer les plateaux d'"Apostrophes" dans les années 80, est aujourd'hui dénoncé comme un apologue de la pédophilie. Et personne ne laissera un de ses ouvrages en vue sur sa table de nuit...
Quant à Anatole France, dont un texte avait été sélectionné pour le baccalauréat récemment, les lycéens se demandaient si c'était une femme... 

La cohésion thématique joue donc un rôle clef : Certains thèmes ou sujets peuvent devenir obsolètes ou moins pertinents avec le temps. Un sujet de roman qui se concentre sur des problématiques qui ne résonnent plus avec le lecteur d’aujourd’hui peut être considéré comme démodé.

Le style d'écriture peut-il être démodé ? Comment en juger objectivement ?

>> Le style d'écriture peut être perçu comme désuet au fil du temps.
Les changements dans la langue, la syntaxe, le vocabulaire et les préférences stylistiques peuvent contribuer à rendre un style d'écriture moins en phase avec les attentes contemporaines, parfois ridicule et précieux, ou décalé par rapport à la simplification de notre langage ou le mode de pensée directe que nous pratiquons aujourd’hui.
Cependant, juger objectivement si un style d'écriture est démodé peut être délicat, car cela tient souvent à nos préférences individuelles et aux normes culturelles.
On peut considérer cette phrase de Charlotte Brontë dépassée et un peu ridicule :
Charlotte Brontë, "Jane Eyre" (1847) : "Je ne suis pour personne ce que les hommes appellent une femme charmante. Je ne suis pas faite pour être chérie, mais pour vivre d'une vie de travail, tout comme le feu follet sur la lande et le rocher battu par les vagues."

...En parallèle on peut s’émerveiller sur deux vers de Racine.

Quels sont les thèmes porteurs des romans d’aujourd’hui ?  Le "Moi, je..." prédomine.

>> Avec une sensibilité croissante pour le bien-être et l’équilibre, de nombreux romans contemporains explorent la recherche du bonheur et de la paix intérieure.
La quête de compréhension de soi est un thème d'actualité. Les romans contemporains se concentrent souvent sur le voyage psychologique des personnages, leurs expériences personnelles et une réflexion sur leur propre identité.
 À l'ère de la personnalisation technologique et sociale, certains romans explorent la manière dont les individus façonnent et personnalisent leur vie, que ce soit à travers les choix de consommation, les relations ou la création d'identités en ligne.

Le nombrilisme semble (et pour être plus critique : est) une donnée majeure. En explorant les relations interpersonnelles, la quête de soi et les défis de la communication dans un monde de plus en plus centré sur soi, les personnages sont souvent confrontés à des questions d'identité et de narcissisme.
Le Prix Goncourt 2022, attribué à Brigitte Giraud pour "Vivre vite" en est l’incarnation.

Classique ou démodé ?

Qualifier de « démodé » un type de littérature est une démarche personnelle. Certains peuvent considérer une œuvre comme intemporelle et pertinente, ce qu’on appelle « un classique », tandis que d'autres estiment qu'elle a perdu de sa valeur et de sa portée et qu’elle ne nous parle pas.
La cohérence des thèmes, le vocabulaire, la langue et la syntaxe, la tonalité la critique littéraire font qu’un texte ou un roman s’inscrit dans l’air du temps ou pas.

Mais le lecteur est-il contraint d’aimer l’air du temps ?

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@Juliette Capulet. On parle de cinéma ou de littérature ? Quel méli-mélo. Le hors sujet ne vous fait pas peur.. Rassurez-vous, je n'aurais de toute façon pas eu le temps de répondre aux questions que vous n'avez pas eu le temps de me poser. Les bras m'en tombent.

Publié le 23 Février 2024

@Catarinaviti, La littérature est-elle autre chose que le miroir de la société dans laquelle elle s'inscrit ? Je me posais, hier, cette même question en la transposant aux auteurs des siècles passés. Concluant que certaines questions sont nées pour rester sans réponse ou sans vérité absolue. Votre commentaire relance mon débat intérieur ! Il n'y a pas de hasard (à défaut de vérités vraies).

Publié le 23 Février 2024

Quel admirable tissu d'inepties ! Il faudrait reprendre la chose ligne par ligne, mais comme je n'ai pas que ça à faire, j'interpellerai seulement l'auteur anonyme à propos d'une seule de ses références : Thomas Hardy. Et j'aimerais fort qu'il m'explique comment il se fait qu'un écrivain qui nous parle si peu, paraît-il, aujourd'hui, avec ses oeuvres ancrées dans la ruralité du 19ème siècle anglais, ait vu nombre de ses oeuvres adaptées au cinéma (Polanski avec "Tess", Vinterberg avec "Loin de la foule déchaînée" et Winterbottom avec "Jude" - pour ne parler que d'eux).
Pour tout le reste, c'est tellement bête que les bras m'en tombent...

Publié le 23 Février 2024

Je pense que les productions artistiques d'une époque sont à son image. Elles subliment les qualités et soulignent les défauts des mentalités qui font un pas en avant, deux pas en arrière depuis la nuit des temps, à la recherche d'un équilibre entre le trop et le pas assez que nous ne trouverons certainement jamais parce que nous sommes des êtres pétris d'émotions. L'art laisse une trace de ce combat. La façon d'écrire ce qui est vécu, de peindre ce qui est vu, d'accorder les notes d'une musique ou de sculpter le corps d'un objet répond aux besoins et aux désirs des gens qui appartiennent au même temps. Alors quand nous plongeons dans l'oeuvre d'un autre temps, il faut plonger entièrement : ouvrir grand le coeur pour visiter un monde qui s'est éteint avec ceux qui le faisaient vivre. Et l'apprécier comme on apprécie un monument, respectueusement.

Quant à nous, c'est une autre histoire. Nous pouvons critiquer l'époque qui est la nôtre, mais rappelons-nous que nous n'en aurons aucune autre. Si nous refusons de nous inscrire dans son mouvement, nous finirons à côté de la plaque. Alors pourquoi ne pas tourner avec elle, même si elle ne tourne pas rond ? Oscar Wilde a su le faire : c'était un homme d'aujourd'hui, mais hier. Son regard aiguisé sur la société et sa plume reconnaissable entre mille traversent le temps.

Chaque époque a besoin d'outsiders pour évoluer. Alors je suis d'avis qu'il faut écrire comme on l'entend, même si cela implique de nager à contre-courant. Il faut le faire pour nous-mêmes et pour tous ceux qui ne trouvent rien de charmant à l'air du temps.

Publié le 23 Février 2024

Un Worstseller. Yessss. On commence à tutoyer le Nirvana, à c'que j'vois ! Mais, doucement les basses, pondre un worstseller n'est pas à la portée du premier quidam venu ! Ne serait-ce pas une maousse idée à creuser sous forme d'article et d'appel à textes, mister @monBestSeller ?
*
@Charles H, on lui a dit déjà un millions de fois, mais il confond toujours Cécile avec Dolorès. Surmenage intellectuel, tension créatrice exacerbée... allez savoir.

Publié le 22 Février 2024

@sylvie de Tauriac : Vous avez raison : mode n'est pas synonyme de qualité, (bien au contraire) , elle est malheureusement souvent synonyme de commerce, ce qui ne fait pas l'affaire des amoureux de la grande littérature. Mais attention, des écrits qui pourraient être perçus d'un autre temps sont appréciés. Proust vit un revival incroyable.

@Catarina Viti : Ah Catarina, vous avez donc la recette pour faire un WorstSeller...

Publié le 22 Février 2024

J'ai envie de rebondir (boing-boing) sur la question inscrite dans l'introduction : "une oeuvre littéraire peut-elle naître démodée ?"
Assurément ! Et cela de façon bien simple : il suffit, de nos jours, d'écrire autrement qu'on ne parle. Pour commencer.
Ensuite, traiter d'un thème collectif ne trouvant aucun dénouement heureux, même après le mot fin.
Eviter enfin toutes formes de valeurs actuelles et de fantasmes bon teint : fuir le consensus sur le Bien et le Mal.
Si, pour finir, ces suggestions sont mises en mots par un auteur misanthrope, je pense que nous aurons une oeuvre congénitalement démodée.
*
La littérature est-elle autre chose que le miroir de la société dans laquelle elle s'inscrit ?

Publié le 22 Février 2024

Merci pour cet article pertinent à une époque où les personnes qui n'adhèrent pas à la pensée unique sont qualifiés d'extrémistes. La pensée unique et l'air du temps représentent la même chose. Il est également certain que les auteurs contemporains ont un niveau de langue différent de celui de Voltaire, mais est-ce une amélioration ? J'en doute fort. @sylvie de Tauriac

Publié le 22 Février 2024