Tapez bien sur les touches pour former de belles lettres. L’écriture électronique prend la main.
Spécialiste de l'apprentissage de la lecture et du langage chez l'enfant, professeur à l'université Paris Descartes, le linguiste Alain Bentolila s'élève contre cet abandon du crayon. "C'est dangereux pour la mémoire, car on retient beaucoup moins ce que l'on écrit à l'écran que ce que l'on écrit à la main" affirmait-il dans un entretien au Figaro. Une crainte partagée par de nombreux neurologues.
Mais au-delà de la mémoire, qui finalement peut se travailler d'une autre manière, en quoi l'abandon du stylo constitue-t-il un danger ? Parce qu'au fond, tous ceux qui ont connu l’humiliation du trait rageur d'un prof exaspéré par une écriture pattes de mouches et d'une copie illisible, auraient bien aimé que leur copie soit lue jusqu’à son point final. Et puis, maîtriser la calligraphie - dont plus personne ne se servira - à grands renforts d'heures de cours, a-t-il vraiment un sens ?
Par ailleurs, murmure-t-on, le passage du papier à l’écran développe de nouvelles capacités mentales, plus en phase avec le monde moderne, rapide et interconnecté, que nous connaissons tous. Une certaine agilité intellectuelle. Une capacité de passer d'un sujet à l'autre. À voir.
Écriture électronique : écrire autrement, penser autrement, lire autrement. Moins bien, semble-t-il ?
Les résultats d'une étude récente de deux chercheurs américains, Pam Muller et Daniel Oppenheimer montrent que la prise de notes par ordinateur est beaucoup moins efficace pour l'apprentissage que la prise de notes manuscrites, et ce même une fois fait abstraction de l'étudiant qui vagabonde sur Facebook entre deux énoncés.
La prise de notes manuscrites favorise le tri avant rédaction et donc la compréhension de ce qui se dit même si, en termes de rapidité, le clavier est grand vainqueur. Des tests effectués par ces deux chercheurs auprès de deux groupes -d'un côté les adeptes du stylo, de l'autre, les inconditionnels du clavier- ont montré que les premiers avaient été plus attentifs et mieux à même de répondre à des questions précises sur le cours énoncé.
Écrire à la main permet donc de synthétiser l'information et de la retranscrire avec ses propres mots et selon sa propre compréhension.
Aujourd'hui, nombre d'entre nous n'imaginent même pas une seconde rédiger à la main, raturer, réécrire, déchirer la feuille, ne pas réussir à se relire, et apprécient le confort de relire un texte et de le corriger en même temps. Mais nous au moins, on sait que le jour où il y aura une panne de courant gigantesque, ce jour-là, on sera, nous, encore capable d'allumer une bougie, de tenir un stylo et de faire courir sur une page les mots pour la raconter... Mais nos enfants ?
Et je ne résiste pas à l'envie de terminer sur cette anecdote : il paraît que les cadres américains de Google, Yahoo ou Ebay, en bref, toutes les vedettes de la Silicon Valley, préfèrent pour leurs enfants des écoles sans écrans ! Mais çà, c'est du domaine de la rumeur (qu'on a du mal à étouffer d'ailleurs:-))
Sylvie Arzelier
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Les commentaires vont tous dans le même sens finalement : c'est la combinaison des deux modes qui nous aide à penser, élaborer, produire… Personnellement, dans le cadre d'une écriture journalistique, "professionnelle" et non littéraire, le crayon-papier reste indispensable pour le plan… curieusement, le mode clavier me donne le sentiment d'un flux, d'une immersion, contradictoire avec la nécessaire prise de hauteur d'un plan !
Autre remarque : l'écrit papier est aussi bien spécifique pour celui qui reçoit un message. Nous en faisons tous l'expérience aux moments importants de la vie. Adresser des voeux , envoyer un courrier de condoléance… tous les moments de fort engagement émotionnel appellent la main, le stylo, le bloc !
Il faut juste esperer que pour une fois nos gouvernants auront la sagesse de ne pas suivre trop vite cet exemple Finlandais puisque, semble t-il, tout ce qui vient des pays scandinave est parole d'evangile... :)
Oui, c'est bien navrant de passer du crayon au clavier pour moi. D'ailleurs, je ne sais pas le faire puisque je donne mes griboullis à saisir à une autre personne. Mais, est-ce le sujet dans le futur ? Je crois que les progrès dans ce domaine feront assez vite que l'ordinateur répondra à la voix. Et ce sera le langage qui deviendra le maître. S'en plaindra-t-on ? On aura directement : pensée-langage-résultat ( écrit ou phonétique ) A quoi sert de passer par la main ? Il faudra apprendre à parler au lieu d'apprendre à écrire. Je pense que c'est un mieux, car pour parler correctement, il faudra avoir appris à penser d'abord. Ce qui est le fondement de l'éducation, puis de la transmission. Cela n'empêchera pas la main de se dédier aux arts plus nobles de la peinture et du dessin, tout ce qui vient du cerveau qui a du mal à se transcrire en mots. Affiner le langage est une noble tâche pour les nostalgiques de l'écrit. Il reste la hantise de la panne électrique, mais l'on saura aussi fabriquer des piles adaptées à la nécessité. L'ordinateur portable n'a pas besoin du courant électrique. Sans clavier, il se réduit de moitié déjà. Et s'il avait la taille d'un téléphone que l'on met dans la poche ? Nous nous posons des questions parce que nous sommes des ignorants, dont les générations futures riront ( et le rire passera en même temps que le langage, ça c'est bien un progrès, non ?
Oui, effectivement, il y a quelques temps je suis aussi tombée sur cette information. Quand on sait que la maîtrise du trait, apprendre à écrire, c’est faire l’apprentissage de la concentration, de même que cela favorise la mémorisation et l’organisation des informations dans le cerveau, sans oublier que la coordination musculaire dans cet apprentissage est également partie prenante, alors bien sûr, ne pas tenir compte de ces fondamentaux est une aberration. À mon sens, si l’on voulait faire de nos générations futures des « moitiés d’hommes », l’on ne pourrait pas mieux s’y prendre. Mais après tout, c’est bien dans l’air du temps, n’est-ce pas ? Tous ces futurs consommateurs auront-ils besoin de savoir « écrire », alors qu’il leur suffira d’enfoncer une touche sur un clavier pour acheter ? Même leur signature sera électronique. Faites une croix, ici, cela suffira... Car c’est bien de cela qu’il s’agit aujourd’hui, en ces temps où tout est monnayable. Cet état d’esprit faussement altruiste et « pratique » ne concerne pas uniquement un apprentissage aussi basique que celui de l’écriture, car ce n’est qu’une des problématiques de notre époque. Bref, quand on sait que c’est grâce à l’enseignement (autrement dit : la transmission du savoir), que se construisent les civilisations, on peut s’interroger sur les intentions de ceux qui mènent le monde. J’aime mon époque, et écrire à l’ordinateur aussi, mais il m’arrive de me demander ce que ferait notre monde techno-virtuel s’il venait à s’effondrer. Dans quelques décennies, mes petits-enfants seront-ils encore en mesure de lire ce qu’un jour leur grand-mère - qui se piquait d’écriture en son temps - leur a laissé en héritage, en souvenir d’elle ? Auront-ils encore la possibilité de regarder une photo de moi, comme moi-même j’ai plaisir à regarder le visage de mon aïeule photographiée en cette fin de XIXe siècle dans l’atelier du photographe ? Je l’espère, très sincèrement. Dans tous les cas, trouver la juste mesure des choses doit être il me semble un objectif de vie, et utiliser la technologie et non pas la laisser tout régenter pour nous en fait partie. Ce que font d’ailleurs tous les grands pontes du Système, comme le dit très justement Sylvie Arzelier à la fin de son article.
Navrant. Mon meilleur ouvrage est celui que j'ai écrit dans un transat avec un stylo et sur un cachier de brouillon. Je ne suis pas à l'aise avec mon PC portable sur les genoux et la lumière aveuglante en plein été. Vous me direz qu'après il m'a fallu le saisir mais, justement, cela m'a permis de le peaufiner. J'ai toujours beaucoup d'affection pour mes mon vieux stylos à encre qui écrivent si bien ;-) Abandonner définitivement l'écriture cursive est une véritable abbération, à mon avis. Et comme vous le mentionnez, Sylvie que fera-t-on lors d'une gigantesque panne de courant ? En dehors de ne pas savoir écrire, les futures générations seront-elles capables de compter ? A méditer. Pour aller plus loin, un site (que je ne citerai pas) a développé un algorithme qui est capable de pré-selectionner la qualité d'une nouvelle. Et au vu du résultat, cela me laisse pantoise. J'ai aussi lu que bientôt certains logiciels seront capables d'écrire un roman sans intervention humaine. Vive la robotisation ! Tout à fait d'accord avec vous Yannick, si cela arrivait en France l'idée de ne plus envoyer vos enfants à l'école serait à envisager très sérieusement ; je ferais de même si mes enfants étaient encore scolarisés.
Bien sûr que maîtriser la calligraphie a un sens. Un sens profond qui échappe de plus en plus à l'homme moderne... Blaque à part (quoique, c'était quand même sérieux, la calligraphie est un art d'expression profond, qui permet de mieux lier le corps et l'esprit, comme bien d'autres formes d'art), on se modernise à tous les niveaux. Il est légitime que nos enfants apprennent à se servir d'un clavier, d'un ordinateur, etc... Par contre je frémis d'indignation en lisant des choses comme "abandonner au profit de", "remplacer par" et ce genre de positionnement. Autant savoir se servir efficacement d'un clavier et des nouvelles technologies est un plus obligatoire pour nos enfants s'ils ne veulent pas faire figure d'extra-terrestre (ou de dinosaure) dans le monde de demain, autant supprimer totalement l'écriture cursive me paraît incompréhensible. S'agit-il d'ailleurs d'une suppression totale pour une utilisation complète et unique du clavier ? Je dois avouer être assez sceptique. Si ça s'avère vrai néanmoins, alors je suis inquiet pour tous ces enfants, et extrêmement surpris par cette décision. Je vois mal quel gouvernemernt en arriverait à supprimer purement et simplement l'apprentissage (et la pratique !) de l'écriture. La Finlande en plus, pays plutôt très en phase avec sa population. Surprenant. Pourtant ça a l'air vrai. Autre article qui en parle : http://www.konbini.com/fr/tendances-2/finlande-abandonne-enseignement-ecriture-main. Le jour où une telle décision sera prise en France, je m'occuperai intégralement de l'éducation de mes enfants à domicile et on oubliera l'école... A quand l'obligation de dessiner via des logiciels sans passer par le papier ? NB : les petits Finlandais utiliseront-ils le bépo d'August Dvorak ?