La rentrée littéraire : les mêmes et on recommence ! Amélie Nothomb, David Foenkinos, Fréderic Beigbeder, Olivier Adam. Retenez bien ces noms-là, ce sont les espoirs de la littérature des dix ans à venir. Ces livres, ces auteurs, bons ou mauvais, font le plat de résistance de tous les média. Comme s’il y avait les vedettes et le désert. Sans eux, point de salut. On aurait pu les citer l’année d’avant, voire celle d’avant, voire…
Qu’est ce qui cloche ? Ce ne sont même pas les impératifs commerciaux qui condamnent les maisons d’édition à tout miser sur une dizaine de chevaux ; rendons-nous à l’évidence. Si c’était le cas, la profession n’afficherait pas une baisse de chiffre d’affaires de 1,3% en 2013 (bien pire sans doute en 2014). Est-ce le fait d’une stratégie éditoriale inapte à détecter les nouveaux talents « bankable » ? Est-ce le marketing des « livres » qui n’a pas varié d’un pouce depuis la guerre ? Est-ce l’oubli par les acteurs de leur métier, celui de « découvreurs » et de « révélateurs de talents » ?
Sans doute un peu tout cela.
Mais c’est par-dessus tout leur conservatisme face à la révolution du numérique. Au lieu de les rendre créatives, les maisons d’édition se sont recroquevillées sur ce qu’elles croient être leurs valeurs sûres, s’agrippant à leurs chaloupes. Leur mot d’ordre : tenir les prix (le digital au prix du papier), réitérer les succès aveuglément pour rémunérer la chaine du livre. Cette chaine n’existe plus, les maillons lâchent les uns après les autres, au point que le rôle d’éditeur même est remis en question. Elles ont laissé partir l’autoédition qui fait les nouveaux choux gras de quelques gros éditeurs anglo-saxons (reconvertis pour l’occasion) : vente de services éditoriaux, aide à la publication et commission sur les ventes.
De l’autre côté, Amazon, encore lui, mais aussi Google, iBooks, Oyster, se vantent de mettre un coup d’arrêt au diktat de l’édition traditionnelle en faisant vivre des livres moins visibles, et ce au nom de la diversité culturelle. Le combat qui oppose aujourd’hui l’édition incarnée par Hachette Book et Amazon n’est pas un combat d’entreprise, c’est un enjeu de société.
Les deux sont trop gourmands. L’édition traditionnelle oligopolistique a tenu sous pression sa distribution jusqu’à maintenant pour intégrer et dominer l’ensemble des activités et faire sa loi.
Les diffuseurs d’aujourd’hui, Amazon entre autres, organisent le marché à leur profit. La suprématie dans la distribution leur fait remonter la filière. Ils veulent concentrer verticalement la profession et devenir éditeur, en toute simplicité.
C’est une course de vitesse qui s’amorce maintenant. D’un coté, Amazon perd de l’argent (126 millions de dollars au deuxième trimestre, et un troisième trimestre qui s’annonce mal) ; de l’autre, des chaines de librairies Goliath, comme « Borders », qui mordent la poussière en se mettant sous le régime des faillites. Mais qui nous propose le bon modèle ? Et que préfère-t-on ? La monolithique Amélie Nothomb pour la rentrée, ou 650 000 livres proposés par Kindle Unlimited pour 9, 90 $ ? C’est peut être injuste mais nous, lecteurs, sommes perdus.
Christophe Lucius
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