Il était une fois une petite fille rousse, ainsi pourrait débuter l’histoire de Suzanne Marty. Puis la petite fille grandit ; elle fit des d’études, travailla quelques années en entreprise, planta tout pour se lancer dans une carrière d’actrice, galéra dans le show-biz, et créa « La rousse ». À 39 ans, la Rousse croyait toujours au père Noël et, aux dernières nouvelles, cela ne lui aurait encore pas passé.
Pour le dire autrement, Suzanne écrit à propos de la trentaine, de la quarantaine, du temps qui passe, de l’envie de changer de vie, des cadeaux qu’on attend, peut-être en vain, des folles envies d’ailleurs. Suzanne écrit sur le temps perdu à soupirer après de beaux indifférents, à attendre l’improbable coup de fil d’un troll sexy. Énergie gaspillée, pétards mouillés, déconfiture des illusions certes, mais le tout sur un ton drôle et pétillant.
Flamme, alias Cendrelle, son personnage phare (la Rousse, un peu d’elle, en somme), devient l’héroïne de tribulations d’aspirante actrice en recherche de petits rôles au cinéma (à défaut du Rôle qui rend inoubliable), de femme trop célibataire, de citadine en plein questionnement.
Cendrelle passe de la crise de la trentaine à la crise de la quarantaine dans une bonne humeur communicative.
Côté masculin, ses personnages ne manquent ni de charme ni d’originalité : truand maladroit, homme de ménage aux pouvoirs magiques, ou livreur de pizza top-modèle. Parfois insaisissables, toujours imprévisibles, les hommes ne sont jamais ceux que les filles attendent.
Vous l’aurez compris, Suzanne écrit sur nos déboires, nos espérances ; sur le vague à l’âme versus une formidable envie de dévorer la vie. Les émotions sont les couleurs de sa palette de peintre d’une société mi-figue mi-raisin, où la Rousse est bien décidée à gagner au moins une partie.
Question:
À travers tes personnages, notamment la Rousse, tu sembles explorer avec humour et lucidité les grands virages de la vie. Qu’est-ce qui t’inspire dans ces « crises » et comment arrives-tu à garder cette touche pétillante, même en traitant des déceptions ou des envies inassouvies ?
Réponse:
Suzanne Marty - Le thème central de La rousse qui croyait au père Noël a toujours été pour moi la quête de l’identité. Qui suis-je ? Quelle est ma place dans la société ? Et aussi, ai-je besoin d’un homme pour le savoir ou donner du sens à ma vie. Des questions que je me suis posées plus sérieusement en approchant des 30 ans. J’ai pris des décisions radicales pour vivre par passion, j’ai refusé les compromis professionnels et amoureux. En arrivant à 40 ans, le bilan de mes choix était tellement catastrophique que j’ai été prise d’un fou rire un matin dans ma baignoire. Me planter, oui ; déprimer tout le monde avec mes déboires, non. C’est comme ça qu’est née La rousse.
Question:
Pour beaucoup de lecteurs, tes récits résonnent comme un miroir de leurs propres rêves et déceptions. Que souhaites-tu qu’ils emportent de tes histoires, au-delà du divertissement ?
Réponse:
Un des objectifs de La rousse qui croyait au père Noël était de mettre en garde les aspirants comédiens : les paillettes du show-biz, ses réels côtés glamour masquent une précarité dont personne n’a suffisamment conscience en se lançant dans ce milieu. Je vois pourtant de plus en plus de jeunes diplômés et de cadres pas forcément jeunes sur les plateaux, en quête de l’ailleurs dont tu parlais en intro. Je ne peux m’empêcher de m’inquiéter pour eux…
Je souhaitais aussi m’adresser plus largement aux personnes qui se reprochent de n’avoir jamais tenté, ou pas assez, de réaliser leurs rêves. Moi, j’ai consacré ma vie à « suivre mon cœur » et je raconte dans La rousse (de façon très romancée) les conséquences de ce choix. Peut-être, en lisant cette histoire, mes lecteurs seront-ils plus indulgents avec eux-mêmes. Ceci étant dit, je ne vois toujours pas ce que j’aurais pu faire d’autre de ma vie. Me suis-je trompée en visant les étoiles ? Je n’ai toujours pas la réponse. La rousse explore aussi cette ambivalence.
Question:
En autoédition, tu fais preuve d’un professionnalisme irréprochable, avec une attention soignée aux détails et une rigueur visible dans ton approche. Comment arrives-tu à rester aussi motivée et à ne pas céder aux compromis dans un milieu où les obstacles peuvent être nombreux ?
Réponse:
Début 2020, malgré les bons retours des blogs littéraires, j’ai failli arrêter d’écrire. Autoéditer mes trois premiers livres m’avait coûté des milliers d’heures et d’euros pour quelques centaines de ventes. C’est là que le père Noël est venu à mon secours en lançant la publicité sur KDP France. Étant assez à l’aise avec les statistiques, j’ai commencé à l’utiliser un mois avant le premier confinement. Mes ventes ont décollé du jour au lendemain et mes livres en totalisent aujourd’hui près de 6000. Ce n’est pas assez pour vivre de l’écriture, mais c’est assez pour museler mon syndrome chronique de l’imposteur littéraire.
Quant aux compromis, il m’arrive d’en faire. J’évite par exemple d’irriter inutilement certains lecteurs. J’ai aussi changé les couvertures de La rousse jusqu’à trouver des versions qui plaisent. En écrivant le premier tome de La rousse, je n’ai pas du tout pensé aux futurs lecteurs. Aujourd’hui, j’y pense davantage.
Question:
Suzanne, tu as choisi de construire ta présence d’autrice presque exclusivement à travers le numérique, avec un blog impeccablement tenu, sans doute au détriment des salons ou des rencontres en présentiel. Peux-tu nous parler des raisons qui t’ont poussée vers cette voie ?
Réponse:
La principale raison pour laquelle je ne fais pas de salons est que je suis une très mauvaise vendeuse. Je le sais pour avoir dirigé des équipes de vente pendant cinq ans avant de me réorienter dans le spectacle. Cette incapacité atteint son paroxysme quand il s’agit de vendre mes livres. Dès qu’une personne, croyant me faire plaisir, m’annonce qu’elle va acheter l’un d’eux, j’ai cette terrible pulsion de vouloir l’en dissuader. Et si elle était déçue ? Ou que je ne la faisais pas rire du tout ?? Sur Amazon, je n’interviens pas personnellement. Le lecteur décide seul d’acheter un de mes livres. J’en vends ainsi beaucoup plus que si je devais les vendre moi-même en salon.
Question:
Penses-tu que cette proximité physique avec les lecteurs manque à ton parcours, ou le numérique a-t-il comblé ces attentes d’une autre manière ?
Réponse:
L’absence de proximité physique avec les lecteurs ne génère chez moi aucune frustration. Pour moi, l’auteur est un genre de scribe. Il n’est pas forcément représentatif de ce que ses muses lui font écrire. Cendrelle, la protagoniste de La rousse, est beaucoup plus drôle et légère que moi. Si je devais faire des salons, il vaudrait mieux que j’embauche une comédienne pour me remplacer !
Ce qui me comble, c’est de publier des livres qui trouvent leur public en France ou à l’étranger (plus d’un quart des ventes grâce à la pub). Le retour des lecteurs, je l’ai via les commentaires en ligne et les avis de blogs. Ils ont aussi la possibilité de m’écrire. Quelques-uns l’ont déjà fait. Je réponds à tout le monde.
Ce qui me manque en revanche, c’est de travailler avec des bêta-lecteurs en amont de ma publication. Je ne l’ai jamais fait jusqu’à présent. C’est pourquoi j’ai posté sur monBestSeller près de la moitié du tome final de La rousse qui croyait au père Noël. Après avoir envisagé une publication cet hiver, je l’ai repoussée à l’année prochaine pour me donner le temps d’améliorer le texte. Si cet extrait donne envie à quelques-uns d’entre vous – auteurs ou lecteurs – de faire un véritable travail de bêta-lecture sur le manuscrit complet, questionnaire à l’appui, qu’ils n’hésitent pas à me contacter. Je cherche 2 ou 3 femmes ainsi qu’un homme. Le roman est assez long (plus de 75 000 mots, 450 000 caractères), il faut donc être très motivé. Votre retour pourra bien sûr attendre fin janvier, nous aurons tous largement de quoi nous occuper au mois de décembre. Si vous préférez me faire un retour sur l’extrait ou même un seul chapitre, je suis aussi preneuse. Toutes les remarques me seront précieuses.
Je propose aussi à quelques personnes de faire une lecture détaillée (à l’aide du même questionnaire) du tome La rousse a 29 ans, déjà publié. J’aimerais en effet le reprendre avant de sortir le tome 3. Ce tome 2 a été "expertisé" par un éditeur free-lance récemment, mais le compte-rendu ne m’a pas éclairée autant que je l’aurais voulu.
Question:
Les plateformes numériques offrent aussi des outils puissants pour promouvoir ses livres, mais cela demande un investissement énorme en temps et en énergie. Comment jongles-tu entre cet aspect commercial, presque technique, et ton besoin de te concentrer sur l’écriture ? Y trouves-tu un certain plaisir ou est-ce un compromis que tu assumes par nécessité ?
Réponse:
Apprendre à utiliser la publicité sur Amazon (je n’utilise pas encore Meta) m’a demandé du temps, mais pas davantage me semble-t-il que d’autres méthodes de promotion : posts réguliers sur les réseaux sociaux, rédaction d’articles de blogs, services presse avec des blogs littéraires, etc. Quant aux résultats, ils ont été jusqu’à présent incomparablement meilleurs. Et une fois les bases posées, j’ai pu laisser mes campagnes tourner en roue libre pendant plus de deux ans. Les deux premiers tomes de La rousse se vendaient pour ainsi dire tout seuls. J’ai donc pu consacrer tout mon temps libre à l’écriture. Ce qui fait effectivement plaisir !
Question:
Peux-tu nous parler de ton expérience en tant qu’autrice sur Amazon et sur Kobo ? Y a-t-il des différences notables dans la manière dont ces plateformes te permettent de toucher ton public ou dans la façon dont elles t’accompagnent en tant qu’autrice autoéditée ?
Réponse:
J’ai retiré cette année de Kobo les deux premiers tomes de La rousse, car j’envisageais de sortir le dernier tome en exclusivité sur Amazon. Sauf promotion, mes ventes ont toujours été marginales sur Kobo pour des raisons qui ne tiennent d’ailleurs pas qu’à la plateforme. Je lui ai consacré beaucoup moins de temps qu’à Amazon et je suis loin d’avoir exploré toutes ses possibilités. Pour l’instant, je préfère conserver les avantages de l’exclusivité sur Amazon et ne pas me disperser sur plusieurs plateformes. Il ne reste plus que trois de mes nouvelles sur Kobo, dont deux gratuites.
Question:
La promotion de livres sur Amazon passe souvent par des offres éclair ou des systèmes de publicité interne. Y a-t-il des aspects que tu préfères que ce soit dans la manière de toucher ton public ou de les fidéliser ?
Réponse:
Les offres Éclair d’Amazon permettent effectivement de gagner de nombreux lecteurs, le jour même de la promo mais aussi les semaines qui suivent. Les ventes peuvent se compter en dizaines voire en centaines. C’est un outil fantastique car l’auteur n’a rien à faire pour obtenir ce boost de visibilité (à part postuler). Pour obtenir une offre Éclair, un ebook doit néanmoins remplir un certain nombre de conditions (non précisées par Amazon), ce qui peut être long. En attendant, la publicité en ligne permet d’aider l’algorithme à référencer un livre, et à le présenter aux lecteurs les plus pertinents. Toutes les méthodes pour donner de la visibilité aux livres sont bonnes et seront complémentaires, que ce soit au sein des plateformes ou en-dehors.
Si la pub Amazon et les offres Éclairs vous intéressent, j’ai écrit deux articles détaillés à leur sujet sur mon blog.
Question:
Une question hante les auteurs : une fois écrit, mon livre a-t-il encore besoin de moi pour exister et faire son chemin. Penses-tu que tes livres prennent leur envol indépendamment, ou, au contraire, qu’ils sont toujours liés à toi, qu’ils ont besoin d’être portés par ta présence ?
Réponse:
Une fois publiés, sauf bouche-à-oreille exceptionnel, les livres autoédités ont absolument besoin que l’auteur s’investisse dans leur promotion. Sans la visibilité apportée par la publicité Amazon, mes livres auraient cessé de se vendre depuis des années. J’ai d’ailleurs tenté d’arrêter mes campagnes de pub Amazon à titre de test, les ventes se sont vite effondrées. Sans visibilité, un livre n’existe pas ou plus. À chaque auteur de trouver les méthodes qui lui conviennent pour développer et maintenir cette visibilité. Ne faire aucune démarche pour promouvoir ses livres revient à le laisser dans la réserve de la librairie et espérer que les clients le verront quand même…
Question:
Suzanne, l’autoédition est un chemin difficile, où l’on doit être à la fois créateur et entrepreneur. Quels conseils donnerais-tu à ceux qui se lancent et pourraient ressentir le poids de cette double responsabilité ?
Réponse:
Pour s’autoéditer, il faut avoir une âme d’entrepreneur et aimer la polyvalence. Il faut être prêt à acquérir toutes les compétences nécessaires, créatives et administratives, au même titre qu’un éditeur. Ou avoir la possibilité de payer des personnes ayant ces compétences. Et même dans ce cas, il faudra pouvoir évaluer la qualité de leur travail. Heureusement, il existe aujourd’hui beaucoup d’informations en ligne : livres, formations, podcasts, blogs, newsletters en français et plus encore en anglais. Il faut aussi être patient. Même en faisant tout bien, il est peu probable qu’un premier livre se vende à des milliers d’exemplaires. Tout simplement parce qu’il n’aura pas assez d’évaluations, de ventes et qu’il sera inconnu des algorithmes. Ou parce que l’auteur aura fait, comme moi, beaucoup d’erreurs de marketing les premières années.
L’autoédition est une voie difficile, mais elle est aussi très instructive, enthousiasmante, pleine de défis et de petites victoires. C’est aussi la voie de la liberté. C’est pourquoi je l’ai choisie. Si vous n’êtes pas sûr de vous, tentez l’aventure avec un seul livre. Si ce mode de publication ne vous convient pas, vous pourrez toujours le dépublier et le proposer aux éditeurs. Au mieux vous entamerez une aventure exaltante, au pire vous serez mieux armé pour communiquer et négocier avec votre futur éditeur.
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