Interview
Le 06 juin 2019

"Elles rient, mon amour, elles rient" de Chiara Catalina, Sélection mai Prix Concours monBestSeller

La Sélection de mai au Prix Concours monBestSeller est un roman dur, très dur. D’une violence que justifie la maltraitance que subit Pola de sa matrice, comme elle appelle sa mère. A son premier roman qu’il avait trouvé plein de bons sentiments, un éditeur avait dit à Chiara Catalina que les lecteurs aimaient souffrir lorsqu’ils lisent. Elle l’a écouté. Au pied de la lettre. "Elles rient, mon amour, elles rient", Sélection de mai au Prix Concours monBestSeller.
Chiara CatalinaChiara Catalina, chez elle
Question: 

Chiara Catalina, "Elles rient, mon amour, elles rient", c’est l’histoire d’un enfant maltraité qui subit la violence de sa matrice, comme elle dit en parlant de sa mère biologique. Votre témoignage est tellement fort qu’une de vos premières lectrices vous a demandé si c’était bien une fiction. Vous l’avez rassurée. Mais pourtant dans un autre commentaire, vous dites que vous avez digéré cette histoire, que vous allez très bien… qu’elle est donc la part de fiction et celle de vérité ?

Réponse: 

Chiara Catalina. L’histoire de ce roman est bel et bien fictive. Afin d’aborder ce thème si délicat dans les meilleures conditions et dans un souci de réalisme, je me suis cependant appuyée sur des évènements survenus dans mon enfance. Je n’ai pas souhaité le dire, dans un premier temps, pour deux raisons. La première est que je considère que le texte prime sur l’auteur même si, chaque fois que l’on écrit, pour peu que l’on aille traîner ses mots dans les profondeurs, il y a bien un peu de nous. La seconde, sans doute la principale, est que cette histoire « secoue » déjà suffisamment. Je ne voulais pas en rajouter. Mais les commentaires plus touchants les uns que les autres m’ont fait admettre que les lecteurs perspicaces avaient compris. Je l’ai donc dit, pour être totalement transparente. Mais, j’insiste, il s’agit d’une fiction basée sur des faits réels, comme tant d’autres romans. « Vipère au poing », pour ne citer que celui-ci, en est l’exemple parfait. J’admets volontiers qu’écrire ce texte a sans doute fini de me libérer de ce passé, a servi d’exutoire, même si tout cela était digéré depuis longtemps. Mais, qui peut vraiment savoir à quel point il est libéré de son passé ? Et qui l’est, quand on y pense ?

Question: 

Vous avez voulu donner de la violence à vos mots. Pourrait-il en être autrement sut un tel sujet ?

Réponse: 

Je n’ai pas délibérément donné de la violence à mes mots. Elle s’est imposée,  a surgi, et je l’ai accueillie naturellement, sans réfléchir. Les personnages, une fois créés, deviennent, peu à peu et curieusement, autonomes. Ils finissent par m’échapper totalement. C’est un sentiment étrange et assez agréable. J’ai donc accepté et assumé les mots de Pola. Comment pouvait-elle raconter ce qu’elle a subi autrement ? Cette femme à laquelle elle ne peut s’identifier, cette matrice, a semé, dans son corps et dans son esprit, durant des années, de la violence. Uniquement. Une violence qui peut tuer et qui conduit inévitablement à une haine féroce, contenue, larvée, qui ne peut s’exprimer. Le moment venu, lorsqu’il devient enfin possible de l’extraire, de s’en affranchir, elle ne peut employer que ce qu’elle connaît : la violence. C’est probablement la seule réponse salvatrice à l’horreur subie, à la barbarie. Il faut extirper, déraciner et c’est inévitablement violent.

"Ce que j’ai écrit ressemble à ce que tous les enfants battus ont vécu, ou vivent"

Question: 

Au delà de l’histoire de Pola, avez-vous enquêté sur les enfants maltraités ? La vie de Pola, c’est celle de tous ces enfants ?

Réponse: 

Je n’ai pas enquêté sur la maltraitance. Je n’ai pas eu besoin de le faire pour écrire ce roman. Je ne l’ai pas fait après. Quand on l’a vécue, cette maltraitance, cette plaie de l’humanité parmi tant d’autres, il est assez insupportable d’imaginer que d’autres  l’ont vécu, la vivent. Il ne s’agit pas de déni, certainement pas, mais de peine face à l’impuissance. Au-delà de Pola, je ne prends cependant pas trop de risques en supposant que ce que j’ai écrit ressemble à ce que tous les enfants battus ont vécu, ou vivent. 

"Comment allaient réagir les lecteurs face à l’intolérable et, justement, face à ces mots violents employés par Pola ?"

Question: 

Les acteurs disent souvent qu’ils ont eu besoin de temps pour se remettre d’un rôle difficile, pour ré-atterrir dans leur vie. Vous a t-il fallu du temps également quand vous avez fini de raconter votre récit ?

Réponse: 

Je suis, comme tous les auteurs, envahie par les personnages, mais seulement le temps de l’écriture et de la relecture. Comme je l’ai dit précédemment, ils deviennent autonomes. Je n’ai donc pas de mal à me remettre dans la réalité, pas plus qu’après avoir regardé un bon film. Après l’écriture de « Elles rient, mon amour, elles rient… », j’ai fermé le manuscrit, soulagée de l’avoir terminé comme chaque fois que je termine un roman, mais avec une petite appréhension toutefois. Comment allaient réagir les lecteurs face à l’intolérable et, justement, face à ces mots violents employés par Pola ? Cette question m’a poursuivie quelques semaines, puis s’est évanouie.

Question: 

Comment vous avez trouvé votre titre, le contraste que vous avez voulu créer. Comme pour rétablir un équilibre entre le mal et le bien ?

Réponse: 

Je l’ai trouvé à la toute fin. Lorsque j’ai posé la dernière ligne, la dernière phrase, je me suis dit « voilà, ce sera le titre ». Il est sorti de la page blanche, comme mis en relief. Les étoiles, là-haut, les yeux du ciel, témoins du malheur de Pola pouvaient désormais rire. Cela équilibre en effet le bien et le mal. C’est une bonne chose que l’équilibre rôde en permanence. Après le malheur, vient le bonheur. L’inverse est aussi vrai. Nous vivons dans un monde dualitaire. L’ombre ne peut aller sans la lumière, le rire ne peut aller sans les larmes, le froid ne peut aller sans le chaud etc… C’est sans doute ce qui fait la beauté de ce monde, ce qui permet de tenir debout en cas de tempête et de vivre pleinement les moments heureux lorsqu’ils sont là.

"J’aime aller fouiner dans l’ombre pour en déraciner un peu de lumière".

Question: 

Vous avez écrit d’autres livres, d’autres textes durs. Vous pensez être l’auteure de textes qui ne peuvent qu’être durs ?

Réponse: 

C’est curieux d’entendre ça aujourd’hui. Lorsque j’ai écrit mon premier roman, il y a longtemps, il s’est retrouvé presque par miracle dans les mains d’un éditeur qui m’a expliqué que c’était bien écrit, mais qu’il y avait trop de beaux sentiments, que cela ne suffisait pas et ne pouvait intéresser les lecteurs qui aiment souffrir lorsqu’ils lisent. J’ai trouvé cela étrange et puis, quelque temps plus tard, ce même roman a été lu par Antoine Sénanque (que je remercie pour ses précieux conseils et sa gentillesse). Il m’a fait un très joli retour mais m’a suggéré de pousser la psychologie de mes personnages. Il manquait donc quelque chose à mon écriture et à ces gens que je fabriquais. Trop jolis, trop lisses, trop propres. J’ignorais comment j’allais m’y prendre, mais je m’y suis employée. Trop, peut-être. J’avoue que maintenant, j’aime aller fouiner dans l’ombre pour en déraciner un peu de lumière. Et derrière un écran, c’est confortable. On a tous les droits quand on écrit.

Question: 

Les commentaires de vos lecteurs sont tous unanimes ! En quoi les commentaires que vous recevez peuvent-ils influer votre plume pour votre prochain livre?

Réponse: 

Je suis profondément touchée par les commentaires unanimes. Les thèmes que j’aborde sont toujours particuliers, voire « dérangeants » mais pas provocateurs. Ces retours me rassurent. Ils me donnent envie de continuer et je prendrai évidemment en compte les suggestions de chacun. Mais je ne pense pas qu’un auteur puisse modifier fondamentalement sa plume. Sa plume étant la manière dont il dentelle ses mots mais aussi le sens qu’il y met. Il peut l’améliorer, cette plume, la faire évoluer, l’affiner, l’acérer, mais pas la changer. Puisqu’elle est une partie de son âme.

"J’ai cherché sur quelle plateforme déposer mon texte. La vôtre m’a semblé adaptée. Elle est conviviale, attirante, simple à utiliser".

 

Question: 

Vous êtes nouvellement arrivée sur le site. Comment êtes-vous venue ? Avec quelles motivations ? Diriez-vous que vos premières semaines sur monBestSeller ont répondu à vos attentes ?

Réponse: 

Il était temps de partager tout ce travail, de le soumettre à l’avis des lecteurs. J’ai donc cherché sur quelle plateforme le déposer. La vôtre m’a semblé adaptée. Elle est conviviale, attirante, simple à utiliser. J’ai eu, j’ai, et j’espère continuer à avoir de très beaux échanges avec vos auteurs et vos lecteurs. Monbestseller a fait plus que répondre à mes attentes, il est allé au-delà. C’est un endroit formidable pour échanger, partager, évoluer, et est une aide précieuse pour les auteurs. Le chemin parcouru jusque là, en quelques semaines, est déjà bien riche en émotions.

Question: 

On dit qu’on écrit ce qu’on aime lire. Quelle lectrice êtes-vous ? Comment sélectionnez-vous les livres que vous avez envie de commenter ?

Réponse: 

J’aime ce qui m’emporte, quel que soit le genre. « Amphitryon 38 » de Giraudoux est resté longtemps mon livre de chevet, mais je me suis plongée avec délectation dans l’univers de Daphné du Maurier, Arthur Golden, Daniel Pennac, Jean Auel, Prosper Mérimée, Antonio Machado etc… J’ai aussi découvert quelques pépites ici, sur Monbestseller. Je n’ai pas lu ailleurs depuis quelques semaines.

Question: 

Le mCL de monBestSeller sélectionne un livre chaque mois qui est ainsi nominé au Prix Concours de l’Auteur Indépendant que nous organisons chaque année. Cinq auteurs ont ainsi été repérés par les éditeursinvités à être membre du jury 2018 et seront édités cette année. Si vous deviez défendre votre livre devant un jury d’éditeurs, que leur diriez-vous en quelques lignes ?

Réponse: 

Il est toujours difficile de défendre sa propre création, mais, devant un jury d’éditeurs, je dirais que j’aime écrire autant qu’ils aiment lire, que j’ai la même curiosité, et que malgré la secousse reçue à la lecture de ce roman, s’il peut, comme le disent certains lecteurs, permettre de comprendre que l’on peut s’en sortir malgré l’horreur, que la vie gagne et pas l’inverse, et que l’envie de partager en ressort renforcée, alors je veux bien l’emmener aussi loin que possible. Je leur dirais de me faire confiance. Mais c’est à eux de décider si un texte vaut la peine qu’on s’y arrête. Je vais laisser faire « le destin ». Si, à un moment, il souhaite s’inviter dans ce sens dans ma vie, j’en serais heureuse et reconnaissante. Mais, pour l’instant, je vais me contenter de rester dans l’icité.

Question: 

Vous venez de publier un extrait de votre dernier roman sur monBestSeller, « La pimbêche mal fagotée », quel en est le thème ?

Réponse: 

"La pimbêche mal fagotée"… Encore un drôle de thème. Il s’agit d’une jeune femme qui perd son fiancé d’une crise cardiaque. Il se met, quinze jours après les funérailles, à lui parler de son au-delà pour une raison bien précise. Un peu de médiumnité et des tas d’autres choses… Mais je n’en dirai pas davantage pour l’instant… Si vous le permettez…

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17 CommentairesAjouter un commentaire

@Zaacky, un grand merci à vous ! Belle journée. Chiara.

Publié le 20 Novembre 2019

Mes félicitations

Publié le 12 Novembre 2019

@Thalia Remmil, merci pour le petit passage par ici. Oui, nous sommes parfois soumis aux tempêtes, mais pas que... J'aime aussi les histoires qui finissent bien, mais si vous lisez ce roman, ne commencez pas par la fin (sourire). Vos voeux me touchent. Je vous souhaite, à vous aussi, une belle continuation pleine de ces mots qui ont toujours tant de choses à dire... Chiara.

Publié le 12 Juin 2019

@Chiara Catalina, bravo pour votre nomination ! Je n'ai pas lu votre roman, je n'ai le temps de rien en ce moment mais cet article donne grandement le désir de le lire même si vos mots sont durs, et si l'histoire remue les tripes ! J'adore votre titre, j'aime l'idée du contraste mal-bien, ténèbres-lumière tant il est vrai que nous sommes tous fait de ces sentiments contradictoires... certains font le choix des ténèbres, là est toute la différence. Perso, j'aime les bons sentiments, et les happys ends, mais la vraie vie n'est pas faite que de ça, non, la vraie vie est un combat de chaque instant et l'enfance une épreuve à dépasser... Belle continuation ! Thalia

Publié le 12 Juin 2019

@Djil, comme toujours, un très beau commentaire... Merci pour vos encouragements. Que l'univers vous entende (sourire). J'espère que je ne décevrai pas vos attentes avec le prochain roman. Amitiés. Chiara.

Publié le 10 Juin 2019

Bonjour Chiara,
Je suis sincèrement heureux de vous voir nominée. Vos livres sont remarquables et tellement précis.
C'est donc avec grand plaisir, que je me permets de vous écrire ces quelques petits mots, en vous souhaitant bien plus que cette nomination. Je vous présente donc, mes Félicitations ! Puisse l'Univers vous apporter "Succès - Réussite - Bonheur... car tout le "Mérite Vous Revient!".
Bonne continuation à vous, à vos projets en cours et Vivement votre prochain romain.
Bien cordialement.
PS : Merci à vous, car vous avez réussi à me réconcilier avec les livres ! Grâce à vous, je reprends à apprendre à lire ... Donc, MERCI

Publié le 10 Juin 2019

Merci, @Sana To. Touchée. Amitiés.

Publié le 09 Juin 2019

Wow! Quelle bonne surprise de vous voir en tête ce mois-ci, vous le méritez tant. Bonne chance pour la suite. Amitiés.

Publié le 09 Juin 2019

@Cristina Leg, un grand merci ! Et bonne lecture. Amitiés. Chiara

Publié le 07 Juin 2019

@Catarina Viti, peindre une cicatrice avec de l'or, sublimer les objets fissurés... Quelle merveilleuse "comparaison". Merci, Catarina...

Publié le 07 Juin 2019

@lylillou, merci beaucoup pour message très expressif. Très touchée...

Publié le 07 Juin 2019

@lamish, oui, c'est une surprise, heureuse. Une belle surprise. J'ai été très émue en recevant cette jolie nouvelle. Que la vie est surprenante ! Merci, Michèle, pour votre message, touchant, comme toujours... Amitiés. Chiara.

Publié le 07 Juin 2019

Que je suis contente pour vous @Chiara Catalina ! Félicitation !! Après avoir été séduite par l'extrait de "La pimbêche mal fagotée", j'ai entamé "Elles rient, mon amour, elles rient", et dès le début de la lecture on comprend tout de suite que c'est largement méritée :-). De tout coeur avec vous pour la finale. Amicalement. Cristina

Publié le 07 Juin 2019

Bonjour, Chiara. J'ai pensé à votre entretien en découvrant cette vidéo sur l'art nippon du kintsugi.
https://www.facebook.com/ajplusfrancais/videos/lart-du-kintsugi.../585961948438125/

Publié le 07 Juin 2019

Félicitations ... !!!
Merveilleux roman , vous méritez vraiment le titre “d’auteur du mois ” , je suis une Amoureuse de vos oeuvres , j’attends avec impatience votre prochain livre .
Bonne chance pour la finale .
Encore BRAVO ....

Publié le 07 Juin 2019

Merci @, Catarina Viti ! Bonne chance à vous aussi. Jolie soirée.

Publié le 06 Juin 2019

Bravissimo, Chiara ! Bonne chance à votre livre. Auguri ! et bienvenue dans la sélection 2019.

Publié le 06 Juin 2019