Le passé simple disparait peu à peu, en toute discrétion. Cela ne date pas d’hier. De nombreux auteurs classiques avaient déjà opté pour le passé composé au siècle dernier et il a complètement disparu à l’oral. L’Education Nationale, qui trouve ce temps « discriminant », a retiré des programmes les deux premières personnes du pluriel. Pas de quoi, toutefois, pousser des cris d’orfraie. C’est cohérent, la littérature jeunesse privilégiant aujourd’hui le passé composé et le présent… ce qui veut dire que les auteurs ont, comme les enseignants, jeté l’éponge !
Soyons honnêtes, à part moi pour illustrer mon propos, qui oserait écrire aujourd’hui : « Nous nous attablâmes sous la tonnelle. Vous aperçûtes une blatte et vous vous mîtes à hurler. Vous me blâmâtes et vous vous envolâtes ». Le passé composé n’est ni beau ni raffiné, mais il est plus clair et plus efficace : « Nous nous sommes attablés. Vous avez aperçu une blatte et vous vous êtes mis à hurler. Vous m’avez blâmée et vous vous êtes envolé. » En prime, on apprend que c’est une dame qui écrit à un monsieur entomophobe, grâce aux participes passés. Participes dont l’accord reste un casse-tête pour pas mal d’élèves, de professeurs et d’auteurs !
Passé simple ou passé-composé ? Ces frères ennemis ne sont pas des jumeaux. Ils ont chacun leur spécificité. Le passé simple est le plus approprié pour raconter une histoire. Action brève dans un passé révolu. Il donne une vision globale et définitive, contrairement au passé composé. Il est le seul temps apte à construire une chronologie, en permettant de détacher les événements avec un arrière-plan d’imparfait. Il est intéressant de voir qu’au XVIIème siècle, il existait la « règle des vingt-quatre heures » : un fait s’étant déroulé au-delà de vingt-quatre heures, devait se narrer au passé simple.
Quand on commence à écrire un livre, on doit choisir assez vite le temps mais aussi la personne à laquelle on veut l’écrire, car il est difficile de rectifier le tir. Ces choix de base me semblent liés.
Pour mon premier livre, un témoignage, j’ai opté pour le « je ». J’ai vite abandonné le passé simple car, fatalement, j’aurais dû écrire à certains moments « nous allâmes, nous fîmes » etc. Le passé composé a tenu ses promesses d’efficacité et d’ancrage dans un passé récent. En outre, il ne m’a pas empêchée d’utiliser le présent dans les moments que je voulais plus intenses.
Pour mon roman, le passé simple, élégant et doux à l’oreille, s’est imposé naturellement, parce que j’y raconte une histoire à la troisième personne (pas de risque de devoir utiliser les deux premières personnes du pluriel) et parce qu’il s’accorde bien avec une écriture plutôt poétique. Toutefois, j’ai utilisé le présent et le passé composé dans les lettres qui émaillent l’histoire.
Je ne parlerai pas du plus-que-parfait, qui permet de faire des retours en arrière dans une histoire racontée au passé, parce que je n’en suis pas fan. Il existe heureusement des subterfuges pour écrire des flash-backs sans se servir de cette mitrailleuse à allitérations, avec le jeu des liaisons : « Tatie avait été invitée par des titis parisiens qui étaient allés en Inde et s’étaient étalés sur une bouse quand ils avaient atteint le Gange. Elle avait tenté d’écouter, mais une tarte tatin lui avait tapé dans l’œil… »
C’est le texte qui appelle le temps qu’il lui faut. L’auteur est un artisan, les temps sont des outils. Le passé simple en est un sophistiqué. Mieux vaut le connaître pour bien s’en servir. C’est sans doute ce que l’Education nationale trouve « discriminant ». Sans avoir à nous replonger dans nos tables de conjugaisons, il nous suffit de relire les contes de notre enfance pour que nos oreilles retrouvent la musique inégalable du passé simple et, d’elles-mêmes, frémissent à la moindre erreur de conjugaison…
Colette
Vous avez écrit un livre : un roman, un essai, des poèmes… Il traine dans un tiroir.
Publiez-le sans frais, partagez-le, faites le lire et profitez des avis et des commentaires de lecteurs objectifs…
Sourires... @Colette Bacro, merci prof. Heureusement que vous avez reconnu n'être pas personnellement doigtée. Mon propos concene les conseils sur tout genre d'écrit sur MBS. Etant Enseignant, je ne suis pas contre la correction, c'est plutôt la manière, votre manière scolaire et trop pédagogique que je dénonce, Mme. Voici votre commentaire pour m'encourager :(malgré l'intérêt que vous avez éveillé en moi avec votre synopsis et la fraîcheur de votre écriture, je n'ai pas pu lire vos courtes histoires jusqu'au bout. Plutôt que le passé simple, d'un maniement difficile, vous auriez dû choisir le passé composé ou le présent. En tout cas, il vous vous faut trouver un relecteur si vous voulez être lu comme vous le méritez). C'est trop maîtresse et élève ! Exemple andragogique : J'ai bien aimé le message de votre nouvelle et le rythme de votre style. Seulement, je vous suggère qu'il y a quelques erreurs d'orthographe et de grammaire à revoir. De même, je vous proposerais d'utiliser le passé composé au lieu du passé simple, pour simplifier...
Oui je suis seul, c'est l'exception qui valide la règle. Beaucoup réagissent comme moi, à vos commentaires mais autrement ! Moi, je préfère de me donner courage avec ceux qui me lisent déjà, que d'espérer vainement les étoiles des clubs d'amis et de culture qui se notent et se jettent des fleurs. Je ne gagne rien et je ne perds rien. Je sais pourquoi je l'ai fait : Si les membres de MBS étaient majoritairement de mon aire culturelle et littéraire francophone plurielle, je serais aussi peut-être plébiscité! Je me fais très bien plaisir sur MBS. En dehors d'une seule personne qui a lu avec mon Android, je ne connais aucun de mes plus de 500 lecteurs, en moins de 2 mois. Qu'un parent ou un ami note, n'ajoute ni n'enlève rien à la qualité d'un texte, si réellement l'on est objectif dans ses appréciations !!!
AIDER LES AUTEURS À S'AMÉLIORER SUR MBS, PAR LA PÉDAGOGIE OU PAR L'ANDRAGOGIE?
Lorsqu'après plus de 30 ans de vie d'écrivain ou "d'écrivailleur", j'ai découvert ce site de MonBestSeller, je me suis dit que j'avais raté une chance énorme d'être un grand Écrivain et d'avoir des "Bests sellers".
Mais, depuis deux ans environ que suis devenu auteur sur ce site, j'ai dit n'avoir rien perdu et même, peut-être que j'allais arrêter d'écrire depuis si c'était le cas.
Selon moi, Aider les auteurs à améliorer leurs textes n'est pas une occasion pédagogique à des "profs" de langue française ou autres experts en langue, de déverser leur colère sur des adultes qui ont leur perception de soi et veulent apprendre de leurs expériences. Mais, exactement comme en classe avec des enfants, on lit : "votre texte est émaillé de fautes", " je ne me retrouve pas du tout dans votre style", "votre style me déroute", "les temps de votre texte sont dépassés...", etc. Ce sont là des exemples.
Je souhaiterais, que le message du texte soit prioritaire et capital pour la notation, car majoritairement les auteurs ici, ne sont pas sortis d'une école de langue mais ils ont sûrement un message à transmettre à l'humanité. Il faut plutôt utiliser une approche andragogique pour aider les auteurs à améliorer leurs textes. Qu'on ne tue donc pas dans l'œuf des talents qui sommeillent en nous. Beaucoup auraient sûrement déposer leur plume à cause de cette pédagogie scolaire et autoritaire.
Péguy.
@Catarina Viti, c'est tellement très bien dit que je suis entièrement d'accord pour tout votre commentaire !!! RAS.
@Colette Bacro, même s'il y en a déjà dans la cuisine, à côté de la Casserole ?
Mais, je suis très rassuré étant convaincu que la langue française a échappé depuis aux français. C'est notre langue ! Sourires...
Vraiment, je suis très heureux et même riche, après lecture de tous ces débats autour du temps et de la personne du récit, dans la langue française. "Si la chèvre qui vit dans la basse-cour de l'homme, est immolée et mise en morceaux par celui-ci, quel sera le sort de moi, l'antilope qui viens de la brousse, avec cet homme?". Bon week-end à toutes et à tous. Péguy.
Merci Colette pour cet article intéressant ! Tu as raison, le temps s'impose... Comme toujours... Je t'embrasse. Chiara.
@Colette Bacro
Voilà, c'est fait! Vous pouvez lire le livre complet.
Je compte sur vous pour l'aimer et le dire à tout le monde!
Bonne lecture
Cordialement
Domi Montesinos
Merci Colette pour ce sympathique retour.
En somme, vous me conseillez de soumettre l'intégralité du roman aux lecteurs de MonBestseller...?
Le passé composé, c'est dépassé, décomposé par la méconnaissance de notre belle langue.Simple ou composé, laissons le passé à son triste sort pour nous intéresser à l'avenir, lui qui n'est pas encore passé. Le plus simple, c'est, peut-être, de parler au présent. C'est pas dépassé ça, au moins.
L'expression orale et l'expression écrite sont deux univers différents.
Si certains temps peuvent disparaître de l'expression orale sans véritables dommages, en éliminer qu'un seul (ou même seulement une partie d'un seul) revient à fragiliser tout l'édifice de la langue écrite.
Il est préférable qu'un texte sonne bien, mais un texte est avant tout une structure, une architecture dans laquelle la pensée du lecteur doit pouvoir évoluer.
Et le seul outil pour qui nous permette de créer les volumes, les lignes de fuite, la perspective d'un texte, ce sont les temps. TOUS les temps, sans aucune exception, à tous les modes et toutes les personnes.
Un texte raconté au passé et qui ne contiendrait aucun des temps du futur serait, pour moi, aussi plat qu'une carte postale.
Après, bien entendu, c'est difficile, dangereux, problématique.
Mais, comme disaient les Shadoks : "S'il n'y a pas de solution, c'est qu'il n'y a pas de problème".
@Colette Bacro,
Décidément, que de belles tribunes cette semaine. Je regrette presque de m'être absenté quelques jours,
/n
Eh oui ! Toute la difficulté réside bien dans le choix du temps et de la personne.
/n
Comme vous, je préfère le passé simple, élégant et doux à l’oreille, qui s’impose naturellement. Pour mon témoignage j'ai souvent dû utiliser la première personne du pluriel; sinon comment faire pour impliquer plusieurs personnages dans une action ? Hein ! Avez-vous quelques recettes que nous pourrions partager ?