Interview
Le 12 fév 2020

Extases, Sélection de février au Prix Concours monBestSeller

La sélection de février salue un roman-thriller-polar. Entretien avec un auteur pour qui l’esthétique des mots est aussi importante que l’intrigue.
Extases publié par Silas, Sélection de février au Prix Concours monBestSellerSilas, Sélection de février au Prix Concours monBestSeller
Question: 

C’est une visite de Michel Tournier au lycée franco-grec d'Athènes, qui vous donna l’irrésistible besoin d’écrire. Venu vous parler de son roman "Vendredi ou la vie sauvage", vous avez a été fasciné par l’objet qu’il tenait dans ses mains, avant même d'être happé par l'histoire. Racontez-nous cette rencontre, cette découverte.

Réponse: 

Silas En effet, la rencontre avec Michel Tournier fut une rencontre non seulement avec l’auteur mais également avec les mystères du processus de création qui allaient générer une véritable fascination. Prendre du plaisir à le lire n’était pas suffisant, du moins, il y avait autre chose : non seulement le cerveau recelait une énergie (idée, pensée etc…) mais cette énergie était convertissable en de la matière, en une masse effective : l’encre avait donné du corps à l’abstraction. Ca peut sembler étrange, puisque j’avais déjà une dizaine d’années, mais j’avais soudainement pris conscience de la puissance de ce processus qui m’avait laissé perplexe. Quelle chance d’avoir eu en face cet écrivain qui nous parlait de l’histoire tout en tenant son roman dans la main ! Je n’oublierai jamais ce tas de pages reliées qu’il arborait.

 

Je voyais les peintres comme des individus doués d’un talent céleste et les romanciers comme des extraterrestres.

 

Question: 

C’est donc dès votre plus jeune âge que vous avez eu la certitude du besoin d’écrire ?

Réponse: 

Absolument pas. Je pensais ne jamais être capable de me lancer dans une telle entreprise. Cependant j’ai développé le goût de la lecture et, un livre en main, j’essayais toujours de deviner comment l’auteur s’y était pris. Il me semblait absolument impossible d’avoir en tête une histoire totalement construite avec autant de détails. En comparaison, si toutefois celle-ci est permise, je voyais les peintres comme des individus doués d’un talent céleste et les romanciers comme des extraterrestres.

 

"Ecrire, c’est l’inconnu qu’on porte en soi", pour reprendre Marguerite Duras.

 

Question: 

C’est un premier roman ? (qui a donc eu une longue période de gestation ?). On dit que les premiers romans sont (un peu) autobiographiques. Quelle en est la part dans ce cas ?!
Ou au contraire, c’est loin d‘être votre premier essai, c’est juste la première fois que vous publiez sur monBestSeller. Dans ce cas, quel auteur êtes-vous ?

Réponse: 

Mon premier roman s’intitule OUF et cela me rasure car si, comme vous le mentionnez, le premier roman est toujours un peu autobiographique, j’aurais du souci à me faire avec EXTASES en tête de liste (lol). Ce dernier est le deuxième roman que je publie sur monBestSeller. J’ai dû retirer OUF (que j’avais publié sous le pseudo de Phileas) suite à mon engagement auprès d’une maison d’édition. Je rédige actuellement mon cinquième roman et, pour répondre à votre question, je dirais que je suis un auteur qui écrit comme on creuse, avec l’idée d’aller voir ce qui se trouve au plus profond. J’écris comme on cherche. "Ecrire, c’est l’inconnu qu’on porte en soi", pour reprendre la grande Marguerite Duras. Ecrire impose un rythme, permet de polir la réflexion, de développer ses expériences de pensée, de palper l’invisible. Il en ressort toujours quelque chose (que je ne cherche plus à comprendre d’ailleurs, lol) comme des ingrédients. Je n’ai alors plus qu’à doser correctement pour en tirer une recette. Ma hantise est toujours d’ennuyer le lecteur. Cette crainte me force parfois à bloquer des jours sur un paragraphe.

 

Je sais que je tiens quelque chose lorsque j’ai ma première phrase

 

 

Extases publié par Silas
Question: 

Racontez "Extases" aux lecteurs de monBestSeller. L’article qui lui a été consacré en décembre disait que c’était un polar déguisé en roman. Ou un roman déguisé en thriller. Qu’en dîtes-vous ?

Réponse: 

EXTASES ne déroge pas à la règle. Ecrire à la première personne est une façon de se déguiser pour mieux déguiser le texte, si j’ose dire. Un roman déguisé en thriller, lui-même déguisé en polar n’est que le prolongement de cette démarche. L’aspect psychologique est dominant dans le roman. Un aspect dont j’habille tour à tour l’enquête, l’histoire d’amour ainsi que le personnage de Joke, et qui laisse cette impression de déguisement et de superposition d’intrigues. La forme y est pour beaucoup, je pense. Considérant que toutes les idées ont été exploitées dans le fond, je tiens à laisser une place conséquente à la forme, c'est-à-dire à la construction, au rythme et à la musicalité des mots autant que cela est possible. Peu importe le genre, l’esthétique ne doit jamais être négligée. C’est aussi important que l’intrigue, cette dernière devant être une sorte de cerise sur le gâteau. Donner du plaisir, des émotions, offrir un angle de réflexion… c’est un travail très laborieux. Quant à son histoire, il s’agit d’un flic qui développe une fascination à l’égard des victimes du tueur en série qu’il poursuit. Comme s’il avait été contaminé par l’assassin. Il a beau fuir la vie qu’il mène pour s’éloigner de tout ça, une rencontre qu’il pense bénéfique va s’avérer plus déstabilisante qu’elle en a l’air.

 

Question: 

L’intrigue est très bien ficelée. Comment l’avez-vous écrit, saviez-vous dès les premières lignes comment votre roman se construirait ? Ou, l’avez-vous découvert vous-même au fil des pages ?

Réponse: 

Dès les premières lignes ? Ouf ! Absolument pas. Ce serait incohérent avec les réponses précédentes. Je ne vois pas l’intérêt d’écrire une histoire déjà "fabriquée". Je démarre par une ambiance, un état d’esprit ou une humeur plutôt que par une idée. Je sais que je tiens quelque chose lorsque j’ai ma première phrase. L’arbre qui cache la forêt. J’ai hâte alors de découvrir quelle genre de forêt se trouve derrière, hâte de découvrir les intervenants et tout ce que ce petit monde a dans le ventre. Me glisser dans la peau de l’un d’eux est une façon d’infiltrer l’histoire, de la vivre au plus près.

 

Question: 

Vous avez reçu de nombreux commentaires élogieux. Evidemment très encourageants pour un auteur. Vous vous attendiez à cet enthousiasme en publiant "Extases" ici ?

Réponse: 

Aussi encourageant que soient les commentaires, l’enthousiasme est toujours en deçà de ce qu’on espère (hahaha)… Mais peu importe en réalité.

 

Question: 

Un des commentaires dit que vous êtes assurément un auteur à suivre… En quoi ces compliments peuvent-ils influencer l’écriture d’un futur roman ?

Réponse: 

En ce qu’il soit à la hauteur de ce que les lectrices\teurs n’attendent pas ☺

 

Question: 

On dit qu’on écrit ce qu’on aime lire. Quel lecteur êtes-vous ?

Réponse: 

Un lecteur périodique, alternant boulimie et néant. J’apprécie particulièrement l’univers de Kafka. Je suis un grand admirateur d’Amélie Nothomb, Stephen King, Camus, Douglas Kennedy et tant d’autres. Je dirais que je cherche plutôt à écrire ce que j’aimerais lire. C’est ça qui est visé. Quant à l’objectif, je serais ravi de le caresser un jour.

 

Question: 

Vous avez répondu aux commentaires que vous avez reçus. Mais n’avez pas encore commenté d’autres livres… Manque de temps ? Ou n’avez-vous pas perçu le côté "économie solidaire" de monBestSeller ?

Réponse: 

Ha ha ha, le reproche est plus acceptable lorsqu’il est fait avec élégance. ☺ J’ai bien saisi le noble objectif de monbestseller.com. En effet, une longue période difficile durant laquelle le temps m’a manqué, mais je crois aussi avoir laissé quelques commentaires sous le pseudo de Phileas. Je devrais rapidement corriger ce manquement et ce sera avec grand plaisir, vu que quelques perles figurent parmi les œuvres publiées.

  

La critique est bienvenue et est très bénéfique lorsqu’elle est constructive et me pousse à améliorer le texte

 

Question: 

Vous avez publié "Extases" en deux fois sur monBestSeller, d’abord en juillet, puis en novembre. D’abord pour le tester auprès de lecteurs anonymes ? Ou pour tester votre capacité à accepter des commentaires d’anonymes ?

Réponse: 

Pour tester la réaction des lecteurs. La critique est bienvenue et est très bénéfique lorsqu’elle est constructive et me pousse à améliorer le texte. La critique négative d’une œuvre me rendrait triste pour l’œuvre elle-même, que je ferai toujours passer avant son auteur.

    

Question: 

Comment êtes-vous venu ? Avec quelles motivations ?

Réponse: 

Je suis venu en quelques clics ☺… en découvrant le site sur facebook.

Non pas sans la peur au ventre. Mais j’ai trouvé que le site offrait une magnifique opportunité d’être lu.

 

Question: 

Le mCL de monBestSeller sélectionne un livre chaque mois qui est ainsi nominé au Prix Concours de l’Auteur Indépendant que nous organisons chaque année. Trois auteurs ont ainsi été repérés par les éditeurs membres du jury 2019. Si vous deviez défendre votre livre devant un jury d’éditeurs, que leur diriez-vous en quelques lignes ?

Réponse: 

Qu’il a été écrit avec beaucoup de cœur et de sueur.

Vous avez un livre dans votre tiroir ?

Publier gratuitement votre livre

Vous avez écrit un livre : un roman, un essai, des poèmes… Il traine dans un tiroir.
Publiez-le sans frais, partagez-le, faites le lire et profitez des avis et des commentaires de lecteurs objectifs…

@Michel Canal, merci pour cette belle intervention et vos mots touchants. Je ne sais jamais si je fais bien mais je consacre mon énergie à faire au mieux en tremblant à chaque publication. Ecrire est devenu sacré et vous savez certainement aussi bien sinon mieux à quel point c est un exercice difficile .

Amicalement,
Silas

Publié le 19 Février 2020

@Silas, j'ai lu avec beaucoup d'intérêt votre interview, consécutive à la sélection de votre roman-thriller-polar "Extases".
Je n'ai pas encore lu ce roman, mais au vu des commentaires, j'imagine que ce sera un plaisir de plonger dans cette intrigue.
Concernant vos réponses à cette interview, peu à peu mon opinion s'est forgée d'avoir affaire à un talent d'écrivain plus qu'à un auteur de circonstance. Si moi j'ai aimé l'Histoire parce qu'un professeur a su éveiller ma curiosité dès la 6ème, nous présentant des gravures et des fac-similés pour illustrer ses cours, vous nous faites comprendre que vous devez votre besoin d'écrire à la visite de Michel Tournier "je dois à ce Monsieur la paternité de ce qui allait devenir mon inspiration", mais aussi et surtout au livre qu'il tenait dans ses mains "je ne lâchais plus des yeux ce livre… cet objet issu de sa tête… avait cristallisé son imagination".
Le résultat est là : vos deux premiers romans publiés avec succès, le premier retenu par un éditeur, le second déjà récompensé ici même… et vous en êtes à l'écriture d'un cinquième.
J'apprécie la modestie avec laquelle vous expliquez quel auteur vous êtes : "un auteur qui écrit comme on creuse… j'écris comme on cherche… écrire impose un rythme, permet de polir la réflexion, de développer ses expériences de pensée, de palper l'invisible… il en ressort toujours quelque chose… ma hantise est toujours d'ennuyer le lecteur… cette crainte me force parfois à bloquer des jours sur un paragraphe."
C'est là un bel exemple pour les modestes auteurs de circonstance (enfin, ceux qui se considèrent comme tels) que nous sommes en nombre sur monBestSeller.
Au plaisir de vous lire, Phileas/Silas. Merci pour ce partage.

Publié le 15 Février 2020