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Le 08 mar 2024

Narration non linéaire ou désordre chronologique dans les romans

Il y a toujours eu multiples méthodes pour raconter une histoire, chacune porte en elle un pouvoir unique de captiver le lecteur. Parmi ces approches narratives, la structure non linéaire est différente, elle défie les conventions temporelles traditionnelles pour créer un schéma narratif riche de nuances. Sans ordre chronologique classique, cette forme promeut le désordre délibéré du temps, croisant les fils du récit pour révéler une trame plus riche et plus profonde.
La narration non linéaire donne une clef de la psychologie des personnagesLa narration non linéaire donne parfois une clef de la psychologie des personnages

Dans cette exploration narrative, les sauts temporels deviennent des portails vers l'inattendu, invitant le lecteur, (dans un ordre maitrisé par l'auteur) à s'égarer dans les méandres du récit. Ainsi, la structure non linéaire se présente comme un espace presque poétique libéré du temps où le suspense, la psychologie des personnages et la réflexion s'unissent pour former des tableaux qui rompent avec la convention. Le temps devient presque alors un labyrinthe d'émotions et d'événements entrelacés.

 

Rompre l'ordre temporel d'un récit donne de la densité aux personnages de romans

>> La narration non linéaire est une technique littéraire qui rompt l'ordre temporel d’un récit. Cette approche crée des ruptures chronologiques qui permettent au-delà d’un style innovateur de moduler et de jouer sur la perception des personnages, d’explorer la manière dont le temps influence leur attitude et leur comportement.

>> Les désordres chronologiques créent un filtre qui génère une forme de mystère en poussant le lecteur à réfléchir sur le sens de la transformation d’un personnage par les épreuves, les évènements ou la simple force du destin. Cette technique leur donne de l'épaisseur, de la consistance, de la densité

La narration non linéaire crée des effets de tensions, de suspense qui engagent le lecteur

>> Cette technique narrative permet aussi de procéder à des révélations progressives sur les héros, et d’éclairer ainsi leur complexité et leur mode de réaction. Ils ont un vécu (on connait une partie de leur passé, de leurs pensées),et connaitre leurs antécédents font du lecteur un complice (consentant ou pas).

>> Des sentiments comme le remord, le regret, le pardon sont particulièrement adaptés à ce mode de récit. Ce style de narration peut inciter le public à réfléchir davantage sur les relations entre les événements et les personnages. Cela peut conduire à une expérience de lecture très impliquante, cérebralement.

Le désordre chronologique permet de valoriser subtilement des sentiments comme le regret, le remord 

>> C’est du même coup, une structure narrative qui laisse un espace poétique et artistique à des rebondissements et des effets de style.

Analepse et prolepse (les deux techniques pour créer des narrations non linéaires) sont à manipuler avec prudence

>> La première (analepse) est un retour en arrière, un récit d’un événement qui a eu lieu dans le passé. La seconde (prolepse) est une anticipation, une prévision qui permet de voir ce qui arrivera dans l'avenir.
Mais attention néanmoins de ne pas dérouter le lecteur. Analepse et prolepse doivent être maniées avec mesure et prudence. Ce sont des figures de style. 
Si l’ordre non linéaire du récit n’est pas fluide et compréhensible du lecteur, il peut créer une confusion ou générer une complexité inutile.
Voire dans certains cas rendre le récit incompréhensible

Le désordre chronologique doit avoir une véritable fonction dans le récit

>> Le désordre chronologique doit avoir une véritable fonction dans le récit et expliquer des retournements de situations ou des révélations inattendues.
C'est en délivrant des informations clés de manière sélective à travers ces figures de style, que l'auteur peut ainsi explorer la psychologie des personnages de manière originale et approfondie. On pourra ainsi mettre en relief ou insister sur certains aspects des héros.
Enfin cette technique permet d'appréhender habilement des points de vue alternatifs ou des réalités multiples.

>> Créer un désordre chronologique réussi nécessite une planification et une exécution minutieuses. Une mauvaise gestion de cette technique peut entraîner une histoire incohérente ou difficile à suivre.
Car maintenir l'engagement du lecteur reste la mission première de l'auteur.

 

 

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16 CommentairesAjouter un commentaire

Je me rends compte également que j’aime beaucoup utiliser les retours en arrière mais avec parcimonie car j’ai toujours peur de perdre mes lecteurs. Cela nécessite effectivement une grande rigueur et de la préparation (mais avant de me lancer dans l’écriture j’écris toujours des scénarios les plus complets et précis qui me servent de base de travail justement pour éviter les incohérences). Pour ma part j’aime utiliser les bonds temporels pour susciter du mystère et de l’intérêt autour d’un ou plusieurs personnages, par exemple en quoi le passé de quelqu’un va grandement influer sur le destin des autres ? En revanche j’avoue ne jamais avoir utilisé le bond dans le futur j’espère en avoir l’occasion.

Publié le 03 Avril 2024

Bonjour,
Merci pour cet article, qui en est l'auteur ?
Je me rends compte que j'adore écrire mes romans avec ce style littéraire en faisant du lien entre les personnages quelques dizaines d'années plus tard , le parallèle me plaît beaucoup ! C'est certain que cela demande de la concentration au lecteur afin de s'y retrouver. C'est sans doute pour cela que la plupart me disent lire La folie de l'exil en 2 jours , pris dans ce désir d'en savoir plus et de ne pas perdre le fil.

Publié le 26 Mars 2024

Comme Phillechat je pense que ce procédé déclenche la réflexion, mais comme Fanny Dumond également, il arrive que je m'y perde et dans ce cas, l'auteur me perd à mon tour. C'est très utile mais délicat à utiliser !
Merci pour l'article qui déclenche également la réflexion !

Publié le 22 Mars 2024

Très précieuse @Catarina Viti, encore que j'adore qu'on me prenne pour une conne finie (je dis "finie", mais c'est juste une manière de dire ; croyez bien que je m'attache tous les jours à progresser dans ma connerie) je suis presque soulagée d'apprendre que vous ne m'avez pas complètement retiré votre, disons, estime. Remarquez bien que je n'en serais pas morte, mais il me gênait tout de même un peu (allez savoir pourquoi !) de croire que vous nourrissiez contre mon évanescente personne quelque animadversion. (Je dis "animadversion" plutôt qu' "animosité" pour me plier à la nouvelle mode, lancée par l'espiègle Zoé Florent avec le titre à faire fuir les hannetons de son dernier machin, et qui consiste à employer des mots que ne renieraient pas les cuistres de tous poils : "Irrésistible hétéronomie", non, je vous demande un peu !). Je vous rassure sur un point précis : non, je ne suis pas raciste, la meilleure preuve en étant que j'adore baiser avec des nègres, et pas seulement parce qu'ils ont un énorme zizi. (Bon, voilà que je mens encore ; vous savez bien qu'en fait, je suis lesbienne comme le pape, au grand dam de ma maman qui m'aurait bien vue convoler avec Donald Trump - il sera dit que je l'aurai toujours déçue.)
Cela dit, je ne suis pas forcément d'accord avec ce que vous dites de la lecture des chefs-d’œuvre. Il me semble qu'on ne perd jamais rien à se plonger dans ceux-ci, quel que soit l'âge, car le propre des chefs-d’œuvre est d'offrir, à n'importe quel moment de la vie, de quoi se nourrir l'esprit et qu'ils sont très souvent inépuisables.
Cela dit, je vous salue bien bas et je vous adresse même de gros poutous en sucre d'orge. Tenez-vous-le pour dit, sapristi !
PS : J'ai changé de pseudo en hommage à l'autre grand dépendeur d'andouilles de Dosto-truc, mais vous pouvez m'appeler simplement Grouchenka.

Publié le 13 Mars 2024

Très, très, très chère Marie du Rosaire. Merci pour votre réponse. Franchement, ça m'aurait fait mal de vous savoir embourbée dans les mangroves du racisme primaire. Ça m'étonnait, aussi, mais avec l'être humain, on ne sait jamais dans quoi on met la main... On ne va pas trop s'étaler ici sur cette affaire (le Tchad est un de ces pays catastrophiques ; l'être humain n'est pas la principale préoccupation du régime. D'où le mérite de ce projet qui n'a que peu à voir avec la littérature, mais beaucoup avec le sauvetage de la part d'humanité qui peut survivre dans un pareil chaos).
Je vous fais des excuses. Je vous avais mal lue.
*
Ce que je voulais exprimer quant à ces chefs-d'oeuvre de la littérature, c'est que, jeunes, nous sommes un peu obnubilés par nous-mêmes, nos hormones, nos projets, ce qui ne rend pas vraiment apte à saisir la force du génie. En principe, avec l'âge, on commence à s'oublier, on fait de la place, on peut accueillir le monde sans se poser de questions égocentriques. On peut, en quelque sorte, se donner entièrement à une oeuvre, se laisser prendre, entrer tout entier (ou disons presque tout entier) dans ces "cathédrales".
Voilà mon fil à couper le beurre, et je vous l'offre bien volontiers (используйте это с пользой) @María del Rosario Castañeda y Montero. Да благословит тебя Бог, мамочка.

Publié le 13 Mars 2024

Très, très chère Catarina Viti, il aura échappé à votre incomparable perspicacité que je n'ai fait, hormis dans votre esprit, nul rapprochement insultant entre les nègres (sic) et l'analphabétisme ; ce serait-il agi de bleus, de verts, de jaunes ou de rouges que j'aurais formulé la même remarque ; je n'ai basé celle-ci que sur le portrait que vous avez fait du Tchad, où il semble bien que l'école ne doit pas être la première préoccupation (euphémisme !) des dirigeants. Mais quand on veut noyer son chien, il est bien connu qu'il faut l'accuser de la rage... ou de connerie sans rémission. Remarquez que je ne vous en veux aucunement, j'imagine volontiers que votre mot est largement en-deçà de votre pensée...
Pour ce qui concerne Char, je ne plaiderai pas, là non plus, coupable, parce que ça n'était rin d'autre qu'une très pitoyable tentative d'humour : Char, roues, ornière, où l'ornière n'est rien d'autre que notre échange hautement spirituel et non le Tchad, dont j'ignore tout. Mais je vois bien que vous êtes remontée comme une montre folle contre ma fragilissime et très conne personne et que vous retournerez contre ma pomme tout ce que je pourrais essayer de faire valoir. Au fond, ça n'a aucune importance, mais je serais heureuse de connaître tout de même la réponse à ma question sur Dosto-machinchose. Confidence pour confidence, je l'ai lu et relu, de même que toute une flopée de Ruskofs, car j'adore toute la littérature de ces grands cons. Eh oui, mon Dieu, mon Dieu, j'ai menti, car en plus d'être une décérébrée garantie sur facture, je suis aussi une menteuse invétérée.
Cordialement, quoique connement, et à bientôt vous lire.

Publié le 13 Mars 2024

Très chère @María del Rosario Castañeda y Montero. Je ne vous ai traitée de c*** (CONNE) qu’une seule fois dans toute ma vie, parce que votre commentaire ne méritait rien d’autre de ma part. (Entre nous, le dernier n’est pas piqué des hannetons non plus : j’aime bien — façon de parler — votre aimable pensée à propos de l’alphabétisation des nègres, et le rapprochement que vous faites entre le Tchad et une ornière. C’est vachement classieux.)
*
Oui, les Russes, du moins autrefois, et pour ce que j’en sais, dans leur littérature, désignaient la même personne par 36 noms différents. Ce n’est pas une pratique bien gênante, il suffit de s’y faire. Ça peut remplacer, question remue-méninges, le Sudoku ou la Craboule Malgache.
Pour répondre à la question qui risquerait de troubler votre sieston... Oh, et puis zutte et flût, je vous laisse chercher, ça n’est pas si compliqué.

Publié le 13 Mars 2024

@Catarina Viti
Sans doute allez-vous encore me traiter de conne (ce qui est tout de même, si mon avis compte pour quelque chose, quelque peu expéditif), mais je vous avoue que je n'ai jamais lu Dostoïevski. La littérature russe me pose un insoluble problème, dans le sens où la formation des patronymes relève de lois qui échappent à mon pauvre entendement, sans même parler de la prolifération proprement insensée des diminutifs qui a pour résultat que je ne sais jamais de qui parle un auteur qui nomme tour à tour un même personnage par son nom ou par un de ses multiples diminutifs. C'est à devenir fou, et c'est pour cette raison que je fuis cette littérature, trouvant ailleurs moult raisons plus laxatives de sombrer dans l'aliénation mentale.
Cela dit, dans votre dernier commentaire, vous assurez que Dostoïevski fait partie de ces auteurs qu’on lit à un âge où l’on est incapable de s’oublier soi-même. La formule est surprenante, même si je ne pige en aucune façon ce qu'elle signifie. Seriez-vous assez aimable pour éclairer ma lanterne.
Cordialement, quoique connement.

Publié le 13 Mars 2024

Merci pour ces précisions @Catarina Viti.
Entre temps, j'avais pensé à L'étrange cas du docteur Jekyll et de M. Hyde. Mais, dans ce récit qui s'apparente un peu à un récit policier, c'est la multiplication des points de vue qui désorganise volontairement l'ordre de la narration. Ainsi, si on apprend seulement à la fin du récit quel a été le tout début de l'histoire, c'est-à-dire la naissance de Hyde, c'est parce que c'est seulement à la fin du récit qu'on a accès à la confession écrite (donc au point de vue) de Jekyll en personne.
Je pense qu'on ne peut parler strictement de prolepse ou d'analepse que dans le cas où on a le même narrateur d'un bout à l'autre du récit.

Publié le 13 Mars 2024

@Constantin Malheur', il s’agit vraiment d’une rupture de la chronologie. Exemple : le narrateur débarque au pénitencier, campe sa situation, puis commence à présenter des situations particulières sans ordre véritable, si bien qu'on croit que le récit a démarré, puis, sans prévenir, il revient à l’instant T, c’est-à-dire celui auquel il est entré dans le pénitencier. Autrement dit, il va nous parler de Tartempionof et de ce qu’il est advenu tel jour particulier, pour, des pages plus loin, nous expliquer comment il a fait connaissance avec ce Tartempionof, et, plus loin encore, ce qu’il s’est passé ce jour particulier. Une véritable salade qui embarque le lecteur non dans une narration, mais dans l’esprit génial de l’artiste., Dostoïesvki est un dieu. (Il fait partie de ces écrivains qu’on lit à un âge où l’on est incapable de s’oublier soi-même.)

Publié le 13 Mars 2024

@Catarina Viti
Bon, il faut que je le lise aussi (alors que j'ai à peine commencé le Pavese !)
Ce que vous en dites me fait un peu penser à la narration dans Le bruit et la fureur. D'une certaine façon (hypothèse), l'effet produit sur le lecteur par l'éclatement des points de vue se rapproche peut-être de celui produit par l'éclatement de l'ordre chronologique de la narration.

Merci pour cet exemple, mais où j'ai l'impression (dites-moi si je me trompe), d'après ce que que vous écrivez, qu'on n'a affaire ni à une prolepse ni à une analepse mais plutôt à une expansion du récit par rapport à un temps fictif court (impression d'un mois vécu vs un quart d'heure vécu).
Donc, pour préciser peut-être ma question : dans quel roman disons important la prolepse ou l'analepse jouent-elles un rôle déterminant dans le récit (dans plusieurs films, je vois très bien mais pour les romans ça ne me vient pas tout de suite) ?

Publié le 12 Mars 2024

@Constantin Malheur' : "Souvenir de la maison des morts" de Dostoïevski. Mon exemple le plus récent. De la folie. Le père Fiodor a explosé le temps en mille miettes. Vous croyez que le narrateur vous a raconté un mois d'existence au bagne, et vous découvrez que non, cela fait à peine un quart d'heure que le nouveau forçat se tient figé dans l'entrée, figé dans ses premiers instants de forçat, dont, et c'est là le génie suprême, le temps est la plus grande confiscation. Une pure merveille. Et si vous voulez comprendre comment il a réussi un pareil exploit, allez donc voir ses manuscrits.

Publié le 12 Mars 2024

Je vais peut-être dire une bêtise mais il me semble que cette idée d’abandonner l’ordre chronologique pour la narration vient du cinéma et a été appliquée seulement après (et de façon très marginale) à la littérature
(et peut-être davantage à certains genres littéraires).
Du coup, si je puis me permettre, ce qui manque à cet article, ce sont quelques exemples de romans où les procédés mentionnés ont été utilisés avec bonheur.
Le seul exemple auquel je pense c’est le tout début du grand Meaulnes, dont le récit est présenté comme rédigé après les faits. On peut donc peut-être dire qu’il y a une sorte de prolepse. Cela teinte de nostalgie le ton du récit. Par contre, cela n’affecte pas la structure du récit lui-même.

Publié le 12 Mars 2024

Le désordre chronologique est également utilisé au cinéma. Je trouve que c'est un procédé intelligent qui fait appel à la réflexion. Dans le jargon cinématographique on emploie le terme de flashback. @Sylvie de Tauriac

Publié le 10 Mars 2024

Il m'arrive de décrocher à cause de trop nombreux allers-retours, de ne plus rien comprendre quand la lignée remonte à Mathusalem et qu'il me faudrait prendre des notes, faire un arbre généalogique pour me souvenir de qui est qui et qui a fait quoi. Pléthore de retours en arrière peut nuire à la compréhension d'une histoire, oui difficile à suivre.

Publié le 10 Mars 2024

Un procédé déclencheur de réflexion !

Publié le 09 Mars 2024