Auteurs : folie, créativité, talent. Quel est le moteur ? Les écrivains de génie ont ils tous des manies ?
Victor Hugo et Colette n'écrivaient que sur un type de papier bien précis. Pour Barbey d’Aurevilly, l’auteur des «Diaboliques» point de salut en dehors de l'encre rouge et d'une viande saignante avant d'attaquer un nouveau chapitre. Il se dit que Sallinger enlevait ses vêtements au moment d’écrire. Qu’Ernest Hemingway écrivait debout... Si vous êtes de ceux ne peuvent écrire que sur leur vieux Mac, en Arial corps 12 ou la nuit, vêtu de ce vieux pull gris qui vous sert à descendre les poubelles, ce qui suit devrait vous intéresser.
Les auteurs doivent-ils être fous pour écrire (bien) ?
L'étude du King Collège n’est pas la première à suggérer cette association entre créativité et maladie mentale. Une précédente étude datant de 2012, menée le Dr Simon Kyaga de l’Institut suédois Karolinska, montre une prévalence plus élevée de la maladie mentale chez les personnes ayant des professions artistiques ou scientifiques, tels que les auteurs, les chercheurs, les photographes ou encore les danseurs. On a constaté que les gens très créatifs avaient une densité de récepteurs d'un certain type (D2) dans le thalamus, plus faible que prévu, identique aux personnes atteintes de schizophrénie. Le barrage d’informations non censurées enflammerait donc la créativité. Cela expliquerait comment des gens très créatifs parviennent via des connexions inhabituelles à résoudre des problèmes que d’autres ne voient pas. Les schizophrènes ont la même capacité.
Les conclusions des derniers travaux menés par le King Collège et présentées dans la revue Nature Neuroscience montrent également que la créativité partage certains de ses facteurs génétiques avec la schizophrénie et les troubles bipolaires. Elles semblent confirmer que la créativité passe par de nouvelles approches qui nécessitent des processus cognitifs différents des modes de pensée ou de d’expression habituelsl. La créativité serait donc une prédisposition génétique à penser différemment, qui, sous l’influence d’autres facteurs biologiques ou environnementaux, pourrait conduire à la maladie mentale.
Et si l'internement d'Antonin Artaud, ou le suicide de Virginia Woolf, d'Ernest Hemingway ou de Romain Gary sont bien réels, de cette proximité entre créativité et psychose ne naissent pas forcément des artistes psychotiques. Heureusement. Mais revenons à plus de légèreté et à ce que nous appellerons manies d'auteur.
Pour les écrivains, plus il y a de rituels, plus il y a d’incertitudes.
Pour le psychiatre Christophe André, la ritualisation de l'écriture, les tics de l'écrivain soulignent bien la nécessité de ce qu'il nomme un filet psychique. «Il y a, souligne-t-il, d'autant plus de rituels qu'il y a d'incertitude». En effet, il semble que le doute, inhérent à l'acte de création, suscite des comportements de réassurance. Cela peut aller de la nécessité d'agencer son univers (fermer les volets, ranger son bureau, rechercher la solitude absolue), à celle de s'astreindre à une discipline de fer comme Faulkner qui se levait à 4h du matin, ou encore au besoin de ritualiser l'utilisation de ses instruments de travail (avant on taillait son crayon, on choisissait la couleur de son encre, aujourd'hui la taille de la police et l'interlignage de son texte). Il y a aussi le rituel plus physique de Corneille qui, pour purifier son inspiration, s'enroulait dans des couvertures de bure et se roulait sur le sol dans une pièce chauffée pour transpirer et se délivrer de ses humeurs, pour enfin se mettre à écrire. Ou le toc d'Émile Zola, dont la recherche d'inspiration passait par le comptage des becs de gaz ou l'addition des numéros de portes lorsqu’il se promenait dans les rues de Paris. Des manies somme toute inoffensives, compte tenu du résultat !
Sylvie Arzelier.
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