Bonjour @Ph. De Vos. Nous n’avons pas eu besoin d’une Doloréane ni de bricoler une horloge pour nous rendre là où nous en sommes. Durant les fêtes de fin d’année passées dans l’insouciance et la joie du partage en famille, nous étions loin de nous douter que nous retournerions, lentement mais surement, dans un passé que la plupart d’entre nous n’avons pas connu. L’humain est aveugle et aime se boucher les yeux, les oreilles et se taire. Pourtant, lorsque je voyais les petits chinois masqués, vêtus tels des cosmonautes, asperger de désinfectant toutes surfaces, construire un immense hôpital à la vitesse de l’éclair, j’ai réellement commencé de me poser certaines questions. Retourner dans le passé en visionnant un film est agréable pour notre imagination, puis on se dit qu’ Ouf ! il s’agit d’un conte à dormir debout tant l’histoire est enchevêtrée et compliquée. La nôtre ne l’est pas, elle est d’une simplicité déconcertante. Il était pourtant bien là notre ennemi qui n’a pas un seul neurone pour réfléchir, qui frappe au hasard sans aucune considération de qui est qui et qui se moque dans les grandes largeurs de nos armements sophistiqués et de plus en plus performants pour nous entretuer sans aucun remord. Nous défendons notre bout de gras comme les imbéciles que nous sommes. Lui, il s’en fout de nos possessions que nous n’emmènerons pas dans nos tombes. Nous étions parés contre toute attaque possible et comme cela n’arrive qu’aux autres, nous l’avons ignoré longtemps, trop longtemps ce monstre digne d’un conte à apeurer les enfants. J’aime beaucoup votre parallèle, Philippe, avec les temps obscurs de la Seconde Guerre mondiale. Ne dit-on pas que l’Histoire se répète. Nos soldats partaient au front, insouciants, la fleur au fusil. Mais, il s’est vite avéré qu’il n’avait qu’un fusil, qu’un pantalon, des godillots pour deux, qu’ils subissaient ordres et contrordres des généraux, à la science infuse, planqués dans leurs bureaux à tirer des plans sur la comète. Puis la population a connu les files d’attentes devant les magasins, les tickets de rationnement, les ausweiss, le marché noir, les fortunes faites sur le dos de ceux qui voulaient sauver leur vie, les trafics en tout genre, les vols de biens, la délation entre bons Français, les laissés-pour-compte, l’exode de ceux qui n’en pouvaient plus de se planquer comme des rats dans les caves, la faim, l’angoisse pour les enfants, pour les soldats, pour les résistants ingénieux et anonymes, les informations contradictoires et optimistes que cette guerre, la der des der, serait courte… Oui, le jour de gloire reviendra au chef et tous ceux qui auront contribué à faire fonctionner l’Économie retourneront dans l’anonymat le plus complet et devront encore se battre pour obtenir un peu de reconnaissance. J’ai frissonné en lisant votre dernière phrase : « Et lorsque la fin du couvre-feu retentira, étrangement, à l’inverse de 1945, les cloches de Notre-Dame resteront muettes ». Je vous remercie de cette lecture qui m’a donné l’occasion de vous rejoindre, longuement, mais spontanément ! Et je comprends votre désappointement quant au décalage de votre texte dont la publication a bien tardé ! L’actualité va si vite, comme tout dans nos vies, que votre texte perd un tout petit peu de sa portée plus d’un mois après le début des évènements. Mais l’essentiel est d’avoir participé et bien participé avec votre texte dans lequel j’ai retrouvé votre patte. Bien cordialement. Patricia
Publié le 02 Mai 2020