L’écriture est au centre de ce roman épistolaire. Elle traduit les joies et les souffrances de ceux qui officient, passées à la moulinette, souvent arbitraire, des Maisons d’édition qui distribuent les Prix et les blâmes, les coups et les honneurs, comme dans la vie. Marion Desjardins a publié trois romans aux Éditions Gallimard.
Faudrait-il interdire la drogue qu’est l’écriture ? Devrait-on indiquer qu'écrire nuit à la santé ou qu'écrire tue, comme sur les paquets de cigarettes ? C'est ce que pense cet auteur désavoué par son éditeur et qui lui adresse ces lettres qui reviennent sur leur histoire commune. Un règlement de comptes ? Non plutôt une déclaration d'amour à la littérature.
L’auteur Marion Desjardins
Française et canadienne, Marion Desjardins a travaillé comme journaliste pour différents journaux et magazines, en France et au Québec. Elle a publié trois romans aux Éditions Gallimard : « Les mouches noires », « Surtout ne me raconte rien », « Portrait d’un absent ». En 2014, paraît « Lettres à mon éditeur ».
Elle publie ses deux derniers romans en auto-édition : « Courir après » et « La leçon de chinois ».
Ce n’est pas par hasard qu’on se retrouve édité par le célèbre Gallimard. Beaucoup d’appelés et très peu d’élus (5000 manuscrits reçus mensuellement ?). Vous, vous avez été éditée. Rien d’étonnant : votre écriture est ferme, élégante, sobre et précise. Pas un seul tremblement, aucun faux pas. Des phrases découpées au rasoir, pesées et posées à leur juste place. L’art de la digression, du fondu-enchaîné. Une grande maîtrise du verbe, un style salvateur. Au-delà de la forme exquise du texte, une partie du fond m’a grandement interrogée. (Je veux parler des relations avec votre maison d’édition, l’autre étant, à mes yeux, les rapports de l’écrivain à l’écriture.) Je ne vais relever que les points principaux : Le manque d’attitude collaborative : je suis étonnée d’apprendre qu’un auteur puisse être ainsi « livré à lui-même ». Tout l’intérêt de travailler avec un éditeur réside justement dans l’idée d’une collaboration fructueuse. Une collaboration « gagnant-gagnant » où toutes les étapes, de la réalisation à la diffusion du livre, sont travaillées ensemble. Où l’on communique régulièrement, parfois chaque jour, sur l’élaboration du manuscrit en cours, où l’on se rencontre pour en parler, où l’éditeur joue effectivement un rôle de mentor, d’accoucheur. (je parle par expérience). La légèreté : l’anecdote concernant le titre de votre ouvrage m’a carrément sidérée. Il est parfois délicat de trouver un titre, mais quand le cas se présente, le moins qu’on puisse envisager est une réunion de travail ! Quant à la validation d’un titre, elle ne se fait qu’après une recherche poussée dans les moteurs de recherche du catalogue des éditeurs. Le manque de clarté : tous les invendus finissent par être passés au pilon. C’est une règle de fonctionnement qui devrait être mentionnée au contrat. Si ce n’est pas le cas, l’auteur est informé par lettre de la date du pilonnage et de la possibilité que lui offre l’éditeur de se porter acquéreur de tout ou partie du stock à prix réduit. En bref, je me félicite de n’avoir aucun texte digne d’être présenté à votre éditeur ! Mais cela me conduit à quelques réflexions à propos de l’idée que nous nous faisons, nous auteurs, de l’édition. Être édité n’est pas l’aboutissement d’un processus, ce n’est qu’une étape. « L’éditeur est un businessman comme les autres », une maison d’édition est une entreprise. Quand nous passons le seuil d’une maison d’édition, nous devons changer notre perception : notre livre n’est plus « notre bébé » ou un truc dans le genre, mais un « produit culturel ». Il est clair qu’après avoir passé des années à travailler sur un manuscrit, nous avons de facto perdu une grande part de notre objectivité, coincé que nous sommes dans notre « espace rêveur ». C’est pour cela que je me demande de plus en plus si nous sommes bien les personnes les mieux placées pour présider aux destinées de nos livres ou si nous ne devrions pas recourir, comme cela se pratique dans d’autres pays, aux services d’un agent littéraire. En tout cas, grand bravo pour ce livre, merci pour ce partage et surtout bonne chance dans l’autoédition.
Avec une écriture calme et caressante, les mots défilent, parfaits, ourlés, mélodieux, et pourtant d’une redoutable efficacité. De quoi s’agit-il ? De la réalité de l’écrivain(e) et de la manière dont cette réalité peut lui échapper, face aux vérités en trompe l’œil d’un monde éditorial versatile. Mais pas que... Ce livre évoque également, sans tabous ni complaisance, les vrais ressorts de l’écriture, avec aussi ce qu’elle a d'irrépressible et parfois d’incontrôlable. Autant de ressorts qu’une machine éditoriale veut contraindre et calibrer, au point de parfois confondre essentiel et qualité des contenus, avec attrait du contenant… Au kaléidoscope des ressentis, dans ce que l’auteure appelle « la french étiquette », tout y passe : exaltation, plaisir, doute, angoisse, trahison, déconvenue, indifférence "salvatrice" ... Jusqu’à ce livre, cette « lettre à son éditeur » offerte à mBS… Un bien beau roman pour entretenir, comment dit-elle, déjà ?... « La flamme de l’écrivain inconnu ». Merci pour ce superbe partage.
C'est comme une histoire d'amour, ou une histoire de haine. Un couple auteur/ éditeur, c'est une vie, un mariage, un divorce, une vie terne, des scènes, des espoirs, désespoirs... Vous en rendez compte ainsi. Et l'intérêt de votre histoire d'amour, c'est que vous l'avez vécu . Ce n'est pas un espoir déçu, c'est une histoire triste.
Permettre cet échange entre auteurs et lecteurs, c’est la raison de monBestSeller.
merci de partager avec nous cet ouvrage fort à propos ici.
Merci à ces lecteurs formidables qui ont aimé ce livre et surtout à Catarina Viti qui, la première, l'a remarqué. Ca fait du bien au moral d'être lue et appréciée...
Marion