L'enquête est bouclée. On a tué la Mère Michel, le roman policier "commis" par Claude Carron a embarqué tous les lecteurs ! Pas de circonstances atténuantes, ils en ont fait le livre du mois et le dernier nominé du Prix Concours du Livre Inédit'é 2014. En route pour l'époque du pt'it blanc fraisé avec le commissaire Flamberge, hautement truculent et terriblement attachant. Intrigue, suspens, rebondissements en rafale..., voilà quelques indices, mais on ne vous en révèlera pas plus.... La parole à l'auteur.
La personnalité de On a tué la Mère Michel, votre « polar rigolard » comme vous le qualifiez, s’appuie sur un vrai langage. Exhumé des années cinquante et drôlement (au premier sens du terme !) maîtrisé. Comment avez-vous retrouvé cette justesse populaire ?
C'est bien une sorte d'exhumation des années de ma prime jeunesse dont il s'agit. Ceci, depuis des souvenirs de ce quartier aujourd'hui disparu, pour faire du résidentiel au début des années soixante. Ce quartier ouvrier au parler de titis parisiens que ne dédaignait d’ailleurs pas Victor Hugo, qui parle dans ses mémoires, des amis de la rue de l'Amitié, avec une pointe de nostalgie du Rouen "d'avant". Voyez donc un peu le beau monde ayant fréquenté le lieu du berceau de vieilles pierres où je suis né, au 10. Les décors y étaient déjà plantés. Des décors du XIIIe siècle qui avait même servi de toile de fond à André Hunnebelle pour tourner sa version des mystères de Paris, avec Jean Marais dans le rôle principal en 1962, pile poil 120 ans après qu'Eugène Sue ait fait publier son œuvre. En fait, cette justesse populaire ne m'a jamais quitté. Comme le précise un jeune humoriste rouennais actuel, on parle toujours comme çà dans ces quartiers ayant conservé l'âme populaire rouennaise. Avoir été docker comme mon père et mes frères, a sans doute contribué à rester imprégné de ce parler vrai. Le port en constituant le principal vivier.
Votre enquête est très bien ficelée. Suspens, rebondissements, indices distillés au bon rythme… D’où vient votre inspiration ? Un fait divers réel ? Plusieurs retricotés par votre imagination ? Pure fiction ?
En fait, je souhaitais au départ, dédier un roman à cette pauvre Marilou devenue semi clocharde et qui sifflait avec ses doigts à la demande, contre cent sous (5 centimes de francs, soit le prix d'un roudoudou), une femme qui faisait sans doute plus vieille que son âge réel. Cette brave Marilou qui nous tenait parfois compagnie quand nous avions peur du soir dans ce quartier vétuste, restant là avec ses amis clochards, dont un philosophe dénommé Moustache, qui nous contait des histoires passionnantes. Cette femme que notre père nous disait avoir connue jeune et belle. Et puis la plume s'est emballée et je me suis retrouvé avec la naissance d'un Flamberge en "flic rouge au grand cœur". Les décors étaient plantés, certains personnages étaient même déjà là, ne restait plus qu'à suivre le fil d’Ariane...
Vous vous appuyez sur un contexte politique de l’époque très réaliste. Vous avez fait des recherches avant d’écrire votre roman ?
Là je me suis tout de même documenté sur le Net (une bien belle invention pour la création) et mes bribes de souvenirs m'ont permis d'orienter mes recherches (mon père avait été résistant et avait fait sauter des convois dans l'Eure après s'être évadé de STO. Il pestait aussi souvent contre les collabos locaux), j'ai donc fait coller mon histoire avec l'actualité de l'époque et des souvenirs de ce que notre père en disait.
Vous avez des accointances avec certains Georges… Lautner et Feydeau. Parlez-nous de ceux qui vous inspirent.
Mes parents adoraient les vaudevilles avec quiproquos et amants dans le placard, du style Feydeau ou Labiche, et comme nous n'avions qu'une chaîne (plus culturelle que la flopée de "cocasseries" que l'on voit actuellement) et qu'en plus nous pouvions nous retrouver à rire en famille à moindre coût (quand nous avions la chance de profiter de cette bonne émission : "au théâtre ce soir" au lieu d'une tragédie ou un match de foot qui nous barbaient), nous étions heureux ensemble, en emmagasinant de la gaieté pour une semaine. Puis il y avait aussi le cinéma de quartier du dimanche : "le Voltaire", à cinquante "balles" la place (en réalité c'était 50 centimes) avec décors de théâtre et balcon avec esquimau à l'entracte, avant de voir un bon Lautner du genre " Les tontons Flingueurs ", (que j'ai adoré dès la première scène et qui avait pourtant fait un flop à l'époque, sans que je comprenne pourquoi), auquel je joins ce formidable Jean-Pierre Mocky et l'incontournable parolier Michel Audiard, mêlant l'argot au langage soutenu avec une réelle dextérité.
Armé avec ces bagages-là depuis tout jeune, que voulez-vous qu’il advienne ? C'est comme pour un flingue trop bien huilé et à la gâchette sensible ces choses-là, çà part tout seul.
Vous avez entretenu le suspens sur le site, donné des extraits en réponse aux commentaires des lecteurs, et publié la suite des aventures du commissaire Flamberge. Que vous ont apporté les échanges avec vos premiers lecteurs sur monBestSeller ?
J'ai eu tout de suite une sensation de relation amicale, voir presque familiale, que je n'ai pas trouvée dans d'autres sites littéraires. Je vais peut-être donner l'impression d'en faire beaucoup, mais je suis plutôt un affectif et c'est pourtant bien ce que j'ai ressenti dès mon inscription (si je sais démontrer mon degré d’affectivité sans ambages, il en est de même à l'inverse, quand je souhaite faire sentir ma désapprobation), je suis franc du collier et j’apprécie cette qualité chez les autres. J'ai régulièrement de nombreux échanges avec des auteurs, des lecteurs et même des éditeurs qui me donnent parfois l'impression d'hésiter devant ce genre de "nouveautés" que je leur propose. De nombreux lecteurs m'ont réclamé une suite, et je leur devais bien çà. L'engouement des lecteurs pour ce commissaire divisionnaire assez particulier, m’a donc aidé à mettre en route le second polar : "Et un poulet rouennais..." et même bientôt le troisième qui verra le commissaire voyager avec sa femme jusqu'aux confins de notre bonne Normandie, sur le Rocher du Mont Saint Michel, chez un cousin aubergiste de son andalouse de femme. À suivre...
Claude Carron. On a tué la Mère Michel. Livre du mois monBestSeller.
Vous avez écrit un livre : un roman, un essai, des poèmes… Il traine dans un tiroir.
Publiez-le sans frais, partagez-le, faites le lire et profitez des avis et des commentaires de lecteurs objectifs…