Interview
Le 29 sep 2022

Les auteurs sont-ils une marque ?

Oui il faut se rendre à l’évidence. Le marketing gagne. Mais est-ce une volonté ? Imperceptiblement, les experts suggèrent que les auteurs construisent leur label. Ils se doivent de créer un halo de cohérence sur leurs écrits de manière à ce que les lecteurs s’y retrouvent, se repèrent. Regardez Amélie Nothomb, pas une fausse note, réglée comme du papier à musique, de l'auto-fiction de précision, d'année en année. Marc Levy, Katherine Pancol pour n'en citer que trois. Paradoxalement ce sont toutes les locomotives des ventes.
Les auteurs sont ils formatés par leurs lecteurs ?Votre prochain roman parle de ce dont parlait votre précédent roman qui parlait de...

Les algorithmes, le critère de demain pour classifier un auteur, mais surtout pour éditer son livre ?

Les grands éditeurs (pas LES GRANDS) aiment les algorithmes. Pourquoi ? Pour aider les lecteurs à faire une sélection facile, afin qu'ils se repèrent. Vous avez aimé "La nouvelle année", vous adorerez "L'année nouvelle". Bien sûr tout cela, aux dépens de la créativité et de l’indépendance.
Mais alors quelle est ma marque ? Fait-elle partie de mon patrimoine d’écrivain où est-elle un artifice ? des attributs que le lecteur ou l’éditeur ont projeté sur moi ? La réponse est sans doute entre les deux. Rester authentique est vraisemblablement la clé mais dans une forme de contrôle, une liberté contrôlée ?

Un auteur est-il condamné à se consacrer à son genre pour toujours ?

L’auteure américaine, Lisa Williamson a écrit un premier essai à succès. (« L’art d’être normal », un essai sur le transgenre). Lorsque son éditeur lui a proposé un contrat pour un second livre, s’est naturellement posée la question pour quel livre ? Un sujet qui me plaît, un sujet approfondissant l’esprit du premier livre ? Est-ce mon talent qui est plébiscité ou mon sujet ?
À sa stupeur, lorsqu’elle remet les épreuves de son second livre, son éditeur laisse tomber un fatal « Not on brand ». Je suis donc « une marque » pense-t-elle. Son premier livre écrit spontanément, naturellement puisant ses références dans la « réalité », est une aventure singulière, un parcours accidentel, pas une thématique choisie par vocation. Son premier livre rencontre par hasard un courant porteur dans "les arts et les médias". Il arrive comme un point d’orgue sur un sujet à la mode. « L’air du temps » comme on dit, mais l’air du temps a aussi une date de péremption.

Heureusement la passion créative semble l'emporter sur le formatage marketing.

Elle mène alors une large enquête sur twitter auprès de nombreux auteurs à notoriété élevée pour approfondir cette question : les auteurs sont-ils condamnés à respecter ce pourquoi les lecteurs les ont aimés ?
Résultats plutôt rassurants, la plupart des auteurs interrogés affirment que s’ils ont un genre de prédilection et qu’ils y sont fidèles, c’est par envie ou par passion.
En contrepoint, ceux qui passent d’un genre à un autre le font par choix créatif malgré une réelle pression des éditeurs, soulignent-ils.

« J’ai résolu la question pour moi-même » déclare-t-elle. J’ai "la même voix d’auteur" sur tous mes écrits »… Garder son ADN d’auteur, quel que soit le sujet traité. La vérité est sans doute là. Abstraite mais réelle.

Christophe lucius

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15 CommentairesAjouter un commentaire

Words, words, words...

Publié le 05 Octobre 2022

@Pouffe a Que faites-vous là, cher Pouffe, à mater toutes mes interventions ? Vous vous ennuyez ? Vous n'avez rien d'autre à faire ? Moi pas, mais je veux bien vous suggérer quelque activité ludique... Attendez, je réfléchis... Un peu de patience ! Vous savez que cela me prend tu temps... Ah, j'ai trouvé ! Eh si vous créiez quelques pseudos aptes à pommader votre production littéraire ? C'est-y pas une idée qu'elle est bonne ;-)) ?
Service ;-) ! Ne me remerciez pas...
PS : vous pourriez également leur faire signer vos anciennes nouvelles, histoire de donner l'illusion d'une renaissance, d'un renouveau ;-)... Chouette idée itou, non ?

Publié le 04 Octobre 2022

Merci @Christophe Lucius, votre analyse est très intéressante et est source de beaucoup de réflexions. Par exemple, qu'en est-il aussi de l'effet de mode, des stratégies des éditeurs et des réseaux de connaissance entre auteurs et éditeurs ?
Certains écrits peuvent avoir du succès à un moment donné puis voir celui-ci s'estomper peu de temps après, ou inversement. Le "marketing" des auteurs n'est alors pris en compte à mon sens qu'à la marge, c'est la "cerise sur le gâteau" pour les éditeurs qui ont prévu leur budget annuel et les collections qu'ils veulent mettre en avant d'une certaine manière cette année-là.
Un auteur doit avoir son style propre et créer sa propre approche marketing, bien entendu, et ça peut faire toute la différence mais à mon sens et sans vouloir être trop pessimiste cela reste assez marginal.
Pour moi, l'approche du marketing de l'auteur ne peut être vu que dans un ensemble beaucoup plus vaste qui comprend tout l'environnement, le contexte et les réseaux de connaissance de l'auteur. Qu'en pensez-vous ?

Publié le 04 Octobre 2022

Merci Christophe pour cette tribune réactualisée, qui soulève des questions cruciales.
Il y a peut-être deux mondes qui cohabitent, celui de l'édition chez "les grands", qui doit répondre à des critères, à des modes, "l'air du temps", correspondre à des standards pour "vendre", ce qui est de toute façon le but ultime, et celui de votre site, plus libre, sans le carcan commercial imposé. C'est finalement une question qui peut se poser dans n'importe quel domaine artistique.
Peut-être que quand un artiste cherche à vendre pour vendre, il perd son âme. Il devient effectivement une marque.
Le plus intéressant dans tous les livres que l'on peut trouver sur votre plateforme, en tout cas ce qui moi m'intéresse le plus, ce sont les auteurs qui font l'effort de se livrer, de creuser dans leurs profondeurs, ou celles des autres, autour d'eux, et de réfléchir à ce qu'ils ont trouvé.
Car au fond de chacun, il peut y avoir des pépites, des émotions fortes, négatives ou positives, témoins d'un élan vital, d'une volonté ou peut-être d'un besoin de partager.
Un auteur qui sait rester authentique et sincère ne deviendra pas une marque, car il ne sera pas dans le marketing.
En tant que lectrice, j'ai parfois eu le désir de lire tous les livres d'un auteur. Il apparait assez nettement que la qualité n'est pas toujours d'un niveau constant...
Un excellent auteur peut aussi finir par écrire des platitudes. On sent qu'il s'essouffle, qu'il n'a peut-être rien à dire à cette période, ou qu'il tourne en boucle, qu'il ne se renouvelle pas, ou pas aussi bien qu'on aurait pu l'espérer. Il faut aussi savoir sortir de ses ornières :)
Merci d'avoir lancé ce débat et de nous offrir cette plateforme à l'esprit ouvert !

Publié le 03 Octobre 2022

En tant que lectrice, je pense que chaque auteur possède sa "marque de fabrique" comme tout autre produit, un V. Hugo, un G. Sand... Par exemple, si je veux lire un policier, j'irai plutôt vers celui-ci que celui-là, parce que celui-là use du même procédé (marketing ou pas) pour construire ses intrigues ; j'en ai lu un, je les ai tous lus. Tandis que celui-ci sait m'embarquer chaque fois dans une nouvelle évasion. Je ne reste pas fidèle à une marque en matière de lecture, j'en teste d'autres et parfois, j'ai de belles surprises qui correspondent à mes goûts.

Publié le 03 Octobre 2022

@Boris Phillips J'imagine que tu ne m'en voudras pas de recopier ici ton commentaire... Je le fais comme un hommage à ta modestie (j'en connais plus d'un qui se serait édité sous ton patronyme, s'il en avait hérité) ainsi qu'à l'humour, à la dérision, qui t'étaient si chers. Pour moucher un auteur itou ; un auteur (j'insiste, pas un écrivain ;-)) assez creux et malveillant pour avoir écrit, après avoir été informé de ta disparition : "Nous perdons un grand vide"...
Paix à ton âme, cher ami,
Michèle
De Boris Phillips :
Je ne vais pas nier qu'il existe une "patte" Boris Phillips : des manies de style ; des tics de langage... Seulement, je mets mes lecteurs au défi : prouvez, si vous le pouvez, que je suis "unificateur" dans le choix des genres d'expression écrite ! Dès mes débuts de "jeune auteur", j'ai revendiqué l'étiquette de "polygraphe" et je compte m'y tenir... Est-ce cela être une "marque" ? Je n'ambitionne pas le "Nobel" ; j'ai trop de talent pour cela ! Est-ce de la mégalomanie ? Oui, pure et dure ! En écrivant cela, je pose MON repère : l'humour et la dérision...
Cordialement.
Boris Phillips.
Publié le 11 Janvier 2016

Publié le 03 Octobre 2022

@Six-Blaireaux, pour me joindre : viti.catarina*gmail.com, tout simplement.

Publié le 02 Octobre 2022

@Six-Blaireaux : Qu'est-ce qui me pousse à visionner (et revisionner) tous les films de Lynch ou de Jarmusch, Ozu, et/ou qui vous voudrez ? Qu'est-ce qui me pousse à passer des mois entiers en compagnie d'un écrivain dont je vais lire une douzaine d'ouvrages à la suite ? Idem avec les autres arts, mais pareil aussi avec un ou une cheffe ? Qu'est-ce qui me pousse à aller régulièrement manger dans le petit resto d'Oriane ? (ne cherchez pas, elle n'est connue qu'ici, dans ma campagne).
Pour moi la réponse est simple : ces gens (auteurs d'œuvres différentes) sont des éclaireurs. Chacun dans son style, dans sa catégorie passe l'essence de son existence à décliner un univers (visuel, auditif, olfactif, gustatif, kinesthésique (sachant qu'un écrivain couvre tous ces champs par son écriture)).
Pour moi, un écrivain, puisque c'est de lui que nous parlons, est cet individu qui largue les amarres et prend la mer. Et sa vie va consister en cette traversée unique et merveilleuse. Toute sa vie va se tendre vers un seul but : capturer le souffle du vent dans sa voile, et nous en donner un aperçu à travers un écrit. C'est ce que j'appellerais sa marque, sa griffe. Car il en va des marques et des griffes en littérature (ou en littératoche), comme dans les autres domaines : Mac Do est une marque, Oriane Journeau aussi. Nothomb est une signature, mais Handke aussi.
Bref, une marque ce n'est pas toujours plus de la même chose (sauf Mac Do & Co), mais c'est toujours plus haut, plus profond, plus beau, plus vrai, plus plus, mais toujours dans la recherche d'une voie particulière. Et c'est cela qui est exaltant et qui m'inspire.
Et il me semble que si j'écris, c'est pour trouver cette voie qui est la mienne... et la diffuser... au cas où elle puisse devenir l'objet d'inspiration d'un lecteur.
En tout cas, créer cet univers personnel, trouver ce ton qui n'appartiendrait qu'à moi (cette "marque" si vous voulez), est ce qui me motive à écrire.
Voilà. J'ai répondu à la question ?

Publié le 01 Octobre 2022

Merci d'avoir remis en ligne cette ancienne tribune qui s'avère toujours d'actualité. En effet, elle rappelle que chacun a son style qui, lorsqu'il est généreux (que l'auteur écrit pour le lecteur plus que pour lui-même), authentique (qu'il n'immite pas, ne plagie pas), a des chances de rencontrer son public (si tout cela se fait dans le respect de notre langue, nous ne le répéterons jamais assez .-)). Elle rappelle combien il est inutile de vouloir l'imposer en le considérant universel, tout comme ses goûts en matière de lecture, voire ses jugements en matière de littérature. Exemple : je lis dans un commentaire, "mangeoires à historiettes", et trouve cela méprisant, réducteur, et pour l'auteure en question, et pour les lecteurs qui l'apprécient. Second exemple : affirmer arbitrairement "Ça, c'est de la littérature", ou l'inverse, "Vous êtes un écrivain", ou l'inverse. Jamais les imbus sectaires n'ont fait avancer les choses. Il suffit de faire un saut dans le passé et un rapide tour d'horizon pour le constater...
Enfin, comme dirait l'autre : "Je dis ça, je dis rien", sans compter que je ne désespère plus de voir se manifester ici quelque ouverture d'esprit qui ne se limite pas au giron de l'intéressé ;-)...
Pour le reste, les interrogations sur les notions de marque, de label, ce ne sont que des termes de marketing qui ne changent pas grand chose à la problématique, en supposant que problématique il y ait, car, dans le fond et indépendamment des considérations économiques de tout un chacun (auteurs comme éditeurs), tout cela n'est que lutte contre l'oubli, la fugacité des choses, l'inconstance d'un lectorat gâté qui se raréfie... Et pour peu qu'à cette course désespérée se mêlent besoin d'exister, frustration et jalousie, la cécité est proche au point de perdre toute objectivité...
À tous, bon week-end,
Michèle

Publié le 01 Octobre 2022

Un article d'une importance capitale.

Publié le 01 Octobre 2022

Bien sûr, on écrit pour soi-même mais surtout pour être lu. A mon avis, donc, l'auteur n'est pas une marque, qu'il soit connu ou inconnu. Car avec les lettres de l'alphabet, il existe une infinité de combinaisons pour écrire un livre. Par exemple, un écrivain qui a écrit pendant l'année, un livre sur un thème donné, peut l'année suivante, offrir une autre variante du livre conçu sur le même thème, selon  ses nouvelles inspirations. Comme quoi, on revient à l'affirmation qu'un auteur n'est pas une marque de fabrique, même si les éditeurs le considèrent, s'il a du succès, comme un simple produit commercial, puisqu'ils sont omnibulés par le critère de rentabilité comptable. Quoi qu'il en soit, je pense que lorsqu'on écrit, on cherche également à sortir de la routine quotidienne, à s'évader, à vivre à travers ses personnages réels ou fictifs, une autre vie que la sienne.

Publié le 13 Janvier 2016

Bonjour. J'imagine que c'est surtout une question de positionnement de l'auteur. Que recherche-t-il ? A faire durer une recette qui marche là où il a rencontré le succès, ou à laisser sa muse et sa plume s'exprimer au gré de son inspiration et de ses envies ? Quand on veut vivre de sa plume, j'imagine que ça peut être, à un moment donné du moins, un choix difficile. On est forcément tributaire, au moins en partie, de cette "entité" publicitaire, et quand bien même on écrirait dans des styles et des genres différents, il est possible de se retrouver catégorisé et "étiqueté" par les lecteurs comme par les éditeurs. Un auteur n'est pas une marque, mais au-delà des impératifs commerciaux et des relations avec un éditeur qui attend parfois des choses très précises, il y a des lecteurs à satisfaire, et certains lecteurs n'imaginent pas leur auteur préféré dans un autre genre. Ca ferait dispersion, moins crédible. Difficile de trouver un équilibre entre passion créative et satisfaction du public, surtout quand on a déjà un public. Au-delà du simple marketing, il peut il y avoir la peur de décevoir. Au fond, la question ne serait-elle pas : les auteurs écrivent-ils pour eux, pour les lecteurs, ou pour les deux ? C'est bien de cette relation avant tout que découle le concept de marque, n'est-ce pas ?

Publié le 12 Janvier 2016

Je ne vais pas nier qu'il existe une "patte" Boris Phillips: des manies de style; des tics de langage... Seulement, je mets mes lecteurs au défi: prouvez, si vous le pouvez, que je suis "unificateur" dans le choix des genres d'expression écrite! Dès mes débuts de "jeune auteur", j'ai revendiqué l'étiquette de "polygraphe" et je compte m'y tenir... Est-ce cela être une "marque"? Je n'ambitionne pas le "Nobel"; j'ai trop de talent pour cela! Est-ce de la mégalomanie? Oui, pure et dure! En écrivant cela, je pose MON repère: l'humour et la dérision...

Cordialement.

Boris Phillips.

Publié le 11 Janvier 2016

Je suis plutôt d'accord avec Marianne. Écrire n'est pas comme faire cuire un gâteau en mettant tous les ingrédients dans un «moule». On peut utiliser son propre style dans tous les genres. Et d'ailleurs, tous les grands auteurs s'accordent pour dire qu'il n'y a pas de recette miracle. Je prends comme exemple, James Patterson, l'auteur le plus réputé dans son genre, le polar, qui a publié récemment une série jeunesse, qui n'a aucun rapport avec son style habituel. La vraie recette est d'être soi-même, authentique.

Publié le 10 Janvier 2016

....certes. Cependant, je pense que quand on a rendez-vous avec un auteur, c'est parce que son style, son rythme, sa vision du sujet qu'il décide de traiter nous attire. Un Pierre Lemaître a fait du polar avant "au revoir là haut", de même Ken folett avant "les piliers de la terre" ou un E.E.schmidt qui surf de recueil de nouvelles en romans divers. Faisons confiance au lecteur pour lui laisser picorer son plaisir et se laisser surprendre par la créativité des auteurs qui savent, trans-genre, distiller l'ADN de leur talent hors marketing éditorial. La caricature Nothomb et ses 249 pages en corps 16 syndicalement livrées chaque début septembre reste un cas isolé de mangeoires à historiettes. Beaucoup d' autres continuent de nous enchanter!

Publié le 08 Janvier 2016