Plus l'âge augmente, plus la période de l'avent prend une saveur particulière. C'est une respiration plus profonde, le regard tourné vers l'enfance, habité par la mélancolie des instants où tout semblait teinté de magie.
Nous sommes le 22 décembre au soir. J'allume toutes les bougies qui passent à proximité de mon briquet et j'invite un ami pour partager un thé à la cannelle et croquer dans un pain d'épice. Dans cette lumière orangée et vacillante, le goût est le même que celui que nous trouvions fabuleux lorsque nous étions petits. Sur la face bien dorée, un père Noël est collé. De nos dents, nous le contournons, évitant sa hotte magistrale, épargnant ses gants et les rebords en fourrure de son manteau rouge. Il ne faut pas l'abîmer. Avalant presque religieusement ma bouchée, je demande à mon invité, qui se livre à la même cérémonie que moi :
— Quand tu étais gamin, ça ne t'ennuyait pas de jeter les pères Noël comme celui-ci, ou les papiers de toutes les couleurs qui emballaient les chocolats?
— Oui, je les gardais tous. C'était tellement joli. Maman râlait un peu, mais j'adorais ces petits morceaux d'alu, me répond-il.
— Moi aussi, mais ils finissaient toujours par disparaître, je ne sais pas où. Voilà que ça me reprend comme quand j'avais six ans, je n'ai pas envie de jeter celui-ci, et toi ?
— Je trouve dommage. Sinon je l'aurais arraché tout de suite pour mieux pouvoir mordre dans la pâte. Garde toutes ces images et colle-les au mur, ça te fera une nouvelle tapisserie. Ce sera très approprié pour le repas du réveillon.
— Arrête de dire des bêtises, tiens, prends une mandarine si tu veux.
— Ah oui, volontiers. Dès que tu la pèles, tu te sens tout de suite dans l'ambiance des cadeaux. Tu vas m'offrir quoi cette année?
Nous régressons autour de ces gourmandises; nous retrouvons un bonheur naïf. Nous redevenons ces gosses jouant à faire jaillir des étincelles, en pressant les écorces des agrumes tout près des flammes.
Et sous nos doigts, les coquilles des cacahuètes craquent. Après les avoir ouvertes, nous cherchons la barbe de Saint-Nicolas dans les moitiés séparées. Ces riens nous font un lien invisible avec l'âme de ceux qui nous ont quittés, et ils en deviennent des trésors inestimables.
Le lendemain, j'avais encore un autre pain d'épice que je décidai de déguster en guise de petit-déjeuner. Lorsque je déchirai le papier transparent, quelle surprise! Deux bonhommes barbus, ajustés l'un sur l'autre, tenaient un magnifique sapin sur l'épaule. Deux! Aussitôt je songeai que peut-être je pourrais en conserver un dans les affaires de décorations, juste un seul, pour ne pas le balancer à la poubelle.
Allez, je suis vieille, et les vieilles dames sont sages. Alors avec respect, je vais le placer à la corbeille, le regardant une dernière fois avant de fermer le couvercle. Ses bottes noires n'ont fait aucun bruit, ses cadeaux ne se sont pas écrasés. Il a silencieusement quitté mon monde pour celui des ordures et j'en ai conçu un grand regret.
Vous avez écrit un livre : un roman, un essai, des poèmes… Il traine dans un tiroir.
Publiez-le sans frais, partagez-le, faites le lire et profitez des avis et des commentaires de lecteurs objectifs…
@Christine Rossier
Fruits, oranges, pains d'épices, noisettes et cacahouètes, papiers cadeaux flamboyant de toutes les couleurs ou d'aluminium lumineux qui froisse,
beau cadeau, cadeau de rien du tout...
Nostalgie des noëls passés, quand tu nous tiens...
Bravo pour ce Noël nostalgique !
FF